Le Décolonialisme dans le Supérieur
conceptualisation des enjeux écologiques depuis les sociétés postcoloniales caribéennes ? Cette thèse est
une réponse à ces questions à partir d’une approche interdisciplinaire. Elle débute par une enquête
historique sur les fondations politiques et écologiques du monde colonial caribéen dans son rapport aux
humains et aux non-humains. Elle se poursuit par une enquête sociologique de conflits écologiques
contemporains dans la Caraïbe. Celle-ci comprend une étude approfondie des enjeux politiques et
philosophiques de la contamination de la Martinique et de la Guadeloupe par des pesticides utilisés
dans les bananeraies, dont le chlordécone. L’analyse des critiques et des mobilisations collectives
locales révèle une pensée de l’écologie qui remet en cause une constitution coloniale du
monde caribéen : une écologie décoloniale. Par ailleurs, une attention est portée à certaines politiques
de préservation écologique qui exacerbent les discriminations politiques et les inégalités sociales, à
l’instar de projets de reforestation en Haïti, et de la réserve naturelle de Vieques à Porto Rico. Enfin,
une enquête littéraire montre comment un discours écologique global s’articule à un imaginaire de
l’esclavage colonial et ses figures, telles le navire négrier et le Nègre Marron, qui structurent des
rapports à la terre, à la nature et au monde. Ces trois approches esquissent les caractéristiques d’une
écologie caribéenne cherchant à habiter la terre et à faire monde. Ces expériences me permettent de
proposer une pensée de l’écologie qui a le monde comme horizon : une écologie-du-monde.
L'invisibilité des victimes de l’histoire.
lumière du concept d'invisibilité, d'identifier les sources historiques de cette pensée lévinassienne de
l'invisibilité et d'évaluer les écarts opérés par les usages socio-politiques qui en sont faits (J. Butler, E.
Dussel), afin de déterminer la possibilité d'une contribution originale de cette éthique aux théories de
l'invisibilité sociale. Si l'invisibilité désigne de prime abord la condition de ce qu'on ne peut percevoir
par le sens de la vue, les sciences humaines et les acteurs politiques font aujourd'hui un usage récurrent
et métaphorique de ce terme. Ces usages renvoient à la notion d'invisibilité sociale, pensée par Axel
Honneth comme un déni de reconnaissance, produit par la marginalisation sociale qui frappe certains
groupes sociaux. Or, le concept lévinassien d'invisibilité qualifie non seulement l'irréductibilité d'autrui
à la reconnaissance telle que la définit Honneth, mais aussi la constitution de l'ego comme individu et la
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