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« Le Suicide de Race »

Quand on lit Thuram on est parfois surpris de la profondeur de la pensée qui s’exprime:

« Ne faudrait-il pas que nous tous pratiquions une sorte de « suicide de la race » pour nous libérer des identités de couleur dans lesquelles l’Histoire nous enferme ? »

L. Thuram, La Pensée Blanche

C’est qu’à partir de là, on se prend à imaginer la multitude des choses qu’il faudrait suicider pour se libérer une bonne fois pour toute de tout ce qui entrave la sereine pérégrination de l’âme vers les cieux éthérés d’un monde indifférencié (Le Roi est nu, Le Roi est nu) dans le regard de celui qui l’observe.

Ce sont les propres réhabilitateurs de la Race comme objet de pensée qui font la leçon pour nous expliquer qu’il faudrait suicider l’objet qui les fait vivre ? On n’y croit pas une seule seconde: autant demander à un trader de vouloir fermer la Bourse.

Mais soit, prenons-nous au jeu des dérives de cette métaphore. Oui, car il s’agit évidemment d’une métaphore: quand on se prend à rêver que l’on suicide quelqu’un qui n’est pas soi, ce n’est pas un suicide; c’est un assassinat.

Thuram souhaite donc assassiner la Race. Pour que mieux renaisse l’indifférence, qui caractérisait pourtant le regard que la société portait sur l’oeuvre de Thuram.

Ben oui, nous y étions indifférents. Mais voilà que non seulement nous sommes sommés de nous y intéresser, mais en plus: on y découvre cette idée géniale du suicide collectif de toute identité au profit de rien du tout. Et ce qui subsiste de la violence de cette théologie de la libération mal assumée, c’est la violence du discours imposée à ceux qui le reçoivent:

 Vous allez devoir vous faire violence pour vous libérer des multiples masques que l’on vous oblige à porter

Ibidem

« Se faire violence », « Suicide-toi »: n’y a-t-il personne au bout d’un moment pour faire valoir l’idée que la théologie mortifère qui transparaît dans le discours de ces auteurs relève d’un harcèlement nuisible ?

Alors suicidons la Race; suicidons le genre; suicidons la différence culturelle qui fait le charme de nos cuisines; suicidons le suicide, car nous ne sommes pas tous égaux devant le suicide culturel (Eh oui, il y en a qui ont plus à suicider que d’autres – c’est bien le problème).

Et au final; que serons-nous ?

« Le barbare c’est d’abord l’homme qui croit à la barbarie », Claude Lévi-Strauss , Race et Histoire (1961)

Xavier-Laurent Salvador

Xavier-Laurent Salvador

Linguiste, Président du LAIC