[sous la direction de Bernard Bruneteau et Yves Santamaria]
Le 16 février 2021, Frédérique Vidal, ministre chargée de l’Enseignement supérieur, annonce vouloir « ouvrir une enquête sur l’islamo-gauchisme à l’université ». Six ans auparavant, jour pour jour, le Premier ministre Manuel Valls invitait à « combattre cet islamo-fascisme, puisque c’est ainsi qu’il faut le nommer ». Depuis 1979, la visibilité internationale de l’islam a conduit à incorporer cet acteur jusqu’ici négligé à un imaginaire politique occidental structuré depuis la Grande guerre. Soit afin de l’assimiler à des forces honnies, vaincues et condamnées par l’Histoire, soit pour délégitimer des adversaires recherchant des accommodements toxiques avec une religion politique conquérante.
Les textes réunis dans cet ouvrage sont issus d’un colloque consacré aux rapprochements stratégiques et aux convergences idéologiques entre extrémismes ouest-européens et monde arabo-musulman. Organisé à Grenoble les 29-30 septembre et 1er octobre 2011 par le Centre de recherches et d’histoire de l’Italie et des pays alpins (Grenoble-II) et l’Institut d’études politiques de Grenoble, il entendait apporter quelque profondeur de champ dans un débat trop souvent marqué par le déni ou, pour reprendre un terme démonétisé, l’amalgame. Le délai entre la tenue de cette manifestation académique et la publication des contributions peut apparaître comme déraisonnable et les auteurs sont conscients du fait que certaines tendances observables dix ans plus tôt peuvent se trouver infléchies par la force des choses. Nous avons néanmoins conservé la version originale tant il est vrai que, pour reprendre la formule de Jean-François Revel, « La lucidité rétrospective et le courage rétroactif sont l’une des formes de la connaissance inutile. »