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La figure des Amazones entre sport et mastectomie. Avec Pascale Joubi et Ariane Ferry (Séminaire TIGRE Mythe et Illustration, ENS Paris)

La figure des Amazones entre sport et mastectomie. Avec Pascale Joubi et Ariane Ferry (Séminaire TIGRE Mythe et Illustration, ENS Paris)

Collectif

Tribune des observateurs

Read More  Pascale Joubi (Université de Montréal), « Modernes Amazones » : les sportives dans l’imaginaire iconographique de la Belle Époque et des Années folles Cette conférence focalisera sur une sélection d’images (lithographies, dessins, illustrations) tirées de la presse satirique et féminine du début du XXe siècle et de certains ouvrages sur celles qu’on nommait « les femmes du sport ». L’observation de la présence du référent amazonien dans l’iconographie et, en parallèle, dans le discours sur les sportives permettra de dégager deux tendances qui caractérisent les reconfigurations du mythe des Amazones durant une période où l’accès des femmes à la pratique sportive provoque un bouleversement dans les identités de genre. À l’heure où la résurgence du mythe des guerrières antiques, femmes libres, indépendantes, combattives et puissantes, pourrait devenir un véhicule d’empowerment pour les Françaises, une vague de résistance conservatrice tente de balayer le féminisme évoqué par le mythe : quand on ne cherche pas à le faire disparaître, on essaie de le détourner de la portée émancipatrice qu’il pourrait avoir. D’un côté, on fait intervenir le mythe sur le plan symbolique pour consolider l’édifice de la féminité : les Amazones antiques sont rendues hétérosocialement compatibles à travers la mise en avant d’Amazones modernes assagies, amoureuses et remarquablement féminines, au point que les modernes ne sont plus qu’une pâle copie des anciennes. De l’autre côté, on l’utilise pour alimenter les craintes suscitées par les changements dans l’identité féminine, et ce, en exploitant l’idée d’une terrible inversion des rôles genrés qui serait causée par l’entrée des femmes dans les arènes sportives. Paradoxalement, cet usage dévoile le potentiel subversif du mythe, qui va finir par se concrétiser lentement mais sûrement à travers le XXe siècle.Ariane Ferry (Université de Rouen), Le sein coupé de l’Amazone : mutilation, force, résilience, beauté
« Prune Nourry, a-mazos amazone », « Prune Nourry, archère résiliente au Bon Marché » : ces deux titres, collectés sur la toile, saluaient l’installation monumentale de la plasticienne Prune Nourry intitulée « L’Amazone Érogène » et accueillie au Bon Marché en 2021 : 888 flèches polysémiques, un arc immense, des cibles-seins de 4 mètres de diamètre.  L’installation s’inscrit dans un parcours de création cathartique et didactique commencé lorsque l’artiste, passionnée par les questions de bioéthique et le fonctionnement du corps humain, apprend, à 31 ans qu’elle a un cancer du sein et va devoir subir une mastectomie, puis une chimiothérapie (un documentaire, Serendipity, un ouvrage, Aux Amazones, plusieurs expositions). L’antique figure de l’Amazone, en termes de représentation, associe l’ablation du sein – perçue culturellement comme une atteinte à la féminité et une virilisation – et la pratique de l’arc, qui fait la force de la guerrière et fonde son aptitude au combat. Devenue figure tutélaire de résistance, d’empowerment, d’affirmation identitaire, la figure de l’Amazone a connu récemment des inflexions intéressantes en lien avec le traitement du cancer : mastectomie, reconstruction du sein – l’anthropologue Corinne Fortier s’est intéressée aux pressions exercées par les chirurgiens en ce sens – ou choix de vivre avec les traces cicatricielles de l’opération, transformation du regard sur le corps féminin et affirmation d’une beauté non conforme aux codes de genre et au male gaze par le tatouage, l’exposition de sculptures et de photographies montrant des corps non plus mutilés, mais résilients et beaux (Boryana Rossa, Art Myers, Annick Parent, Prune Nourry, etc.). « Ni une guerrière, ni une survivante ni une héroïne », affirme aussi un texte publié sur le site Rose Up. Le sein coupé de l’Amazone est moins mis en avant comme le symbole d’une lutte contre la maladie que comme la revendication d’une liberté et d’une énergie créatrice permettant à chaque femme de réinventer et d’assumer son propre corps et d’un partage de mots et de nouvelles images. C’est sur ces représentations contemporaines – discours et images – et leurs enjeux – acceptation de soi, refus des assignations esthétiques genrées, sororité qui se manifeste dans la mise en commun d’expériences et de connaissances – que nous nous proposons de réfléchir dans le cadre du séminaire, après avoir évoqué rapidement les principaux invariants du mythe et quelques exemples de leurs interprétations littéraires et artistiques. 

Pascale Joubi (Université de Montréal), « Modernes Amazones » : les sportives dans l’imaginaire iconographique de la Belle Époque et des Années folles Cette conférence focalisera sur une sélection d’images (lithographies, dessins, illustrations) tirées de la presse satirique et féminine du début du XXe siècle et de certains ouvrages sur celles qu’on nommait « les femmes du sport ». L’observation de la présence du référent amazonien dans l’iconographie et, en parallèle, dans le discours sur les sportives permettra de dégager deux tendances qui caractérisent les reconfigurations du mythe des Amazones durant une période où l’accès des femmes à la pratique sportive provoque un bouleversement dans les identités de genre. À l’heure où la résurgence du mythe des guerrières antiques, femmes libres, indépendantes, combattives et puissantes, pourrait devenir un véhicule d’empowerment pour les Françaises, une vague de résistance conservatrice tente de balayer le féminisme évoqué par le mythe : quand on ne cherche pas à le faire disparaître, on essaie de le détourner de la portée émancipatrice qu’il pourrait avoir. D’un côté, on fait intervenir le mythe sur le plan symbolique pour consolider l’édifice de la féminité : les Amazones antiques sont rendues hétérosocialement compatibles à travers la mise en avant d’Amazones modernes assagies, amoureuses et remarquablement féminines, au point que les modernes ne sont plus qu’une pâle copie des anciennes. De l’autre côté, on l’utilise pour alimenter les craintes suscitées par les changements dans l’identité féminine, et ce, en exploitant l’idée d’une terrible inversion des rôles genrés qui serait causée par l’entrée des femmes dans les arènes sportives. Paradoxalement, cet usage dévoile le potentiel subversif du mythe, qui va finir par se concrétiser lentement mais sûrement à travers le XXe siècle.

Ariane Ferry (Université de Rouen), Le sein coupé de l’Amazone : mutilation, force, résilience, beauté

« Prune Nourry, a-mazos amazone », « Prune Nourry, archère résiliente au Bon Marché » : ces deux titres, collectés sur la toile, saluaient l’installation monumentale de la plasticienne Prune Nourry intitulée « L’Amazone Érogène » et accueillie au Bon Marché en 2021 : 888 flèches polysémiques, un arc immense, des cibles-seins de 4 mètres de diamètre.  L’installation s’inscrit dans un parcours de création cathartique et didactique commencé lorsque l’artiste, passionnée par les questions de bioéthique et le fonctionnement du corps humain, apprend, à 31 ans qu’elle a un cancer du sein et va devoir subir une mastectomie, puis une chimiothérapie (un documentaire, Serendipity, un ouvrage, Aux Amazones, plusieurs expositions). L’antique figure de l’Amazone, en termes de représentation, associe l’ablation du sein – perçue culturellement comme une atteinte à la féminité et une virilisation – et la pratique de l’arc, qui fait la force de la guerrière et fonde son aptitude au combat. Devenue figure tutélaire de résistance, d’empowerment, d’affirmation identitaire, la figure de l’Amazone a connu récemment des inflexions intéressantes en lien avec le traitement du cancer : mastectomie, reconstruction du sein – l’anthropologue Corinne Fortier s’est intéressée aux pressions exercées par les chirurgiens en ce sens – ou choix de vivre avec les traces cicatricielles de l’opération, transformation du regard sur le corps féminin et affirmation d’une beauté non conforme aux codes de genre et au male gaze par le tatouage, l’exposition de sculptures et de photographies montrant des corps non plus mutilés, mais résilients et beaux (Boryana Rossa, Art Myers, Annick Parent, Prune Nourry, etc.). « Ni une guerrière, ni une survivante ni une héroïne », affirme aussi un texte publié sur le site Rose Up. Le sein coupé de l’Amazone est moins mis en avant comme le symbole d’une lutte contre la maladie que comme la revendication d’une liberté et d’une énergie créatrice permettant à chaque femme de réinventer et d’assumer son propre corps et d’un partage de mots et de nouvelles images. C’est sur ces représentations contemporaines – discours et images – et leurs enjeux – acceptation de soi, refus des assignations esthétiques genrées, sororité qui se manifeste dans la mise en commun d’expériences et de connaissances – que nous nous proposons de réfléchir dans le cadre du séminaire, après avoir évoqué rapidement les principaux invariants du mythe et quelques exemples de leurs interprétations littéraires et artistiques.

 

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