Pour se faire pardonner d’avoir critiqué les wokes, Gérard Noiriel plagie ceux qui voient des trans au Moyen Âge

Pour se faire pardonner d’avoir critiqué les wokes, Gérard Noiriel plagie ceux qui voient des trans au Moyen Âge

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Pour se faire pardonner d’avoir critiqué les wokes, Gérard Noiriel plagie ceux qui voient des trans au Moyen Âge

Sur France Culture, dans la chronique que Gérard Noiriel consacre à la sainte « transgenre » du chapiteau de Vézelay, on compte presque autant de larcins et de bourdes qu’il y eut de vols de reliques et de fausses reliques au Moyen Âge!

Rappelez-vous comme Gérard Noiriel était devenu la bête noire des wokes, à cause de son ouvrage contre la logique identitaire de la racialisation (S. Beaud et G. Noiriel, Race et sciences socialesEssai sur les usages publics d’une catégorie, Marseille, Agone, 2021). La presse ne parlait en 2021 que de « l’affaire Beaud et Noiriel », et le New York Times plaçait Monsieur Noiriel quasiment sur le même plan que l’Observatoire du décolonialisme, c’est dire le niveau d’infamie!

Comme le courage est une vertu inégalement répandue chez les universitaires, il semblerait que Gérard Noiriel tente depuis un certain temps de se faire pardonner de ceux mêmes qui ont fulminé sa sentence d’excommunication. Mardi dernier (29 mars 2022), Gérard Noiriel faisait part sur France Culture d’une découverte bouleversante: les « personnes trans » existaient au Moyen Âge (ou dans l’Antiquité chrétienne, on ne sait pas trop), et iels étaient même canonisé·e·s par l’Église!

Quoi de mieux que l’emprunt, quand on veut se faire passer pour plus woke que l’on est? Gérard Noiriel pille (sans jamais donner sa source) la militante « trans » Chloé Maillet. C’est au nom de revendications délirantes que cette activiste prétend faire connaître de soi-disant « personnes trans » qui auraient vécu au Moyen Âge, afin de leur « rendre justice » (« Le cisgenrisme a également pour effet l’invisibilisation des personnes trans et l’effacement de leurs parcours, autant dans la société actuelle que dans des époques anciennes. » Cf. https://dieses.fr/transitude-histoire-et-memoire).

Nous ne discuterons pas de la thèse ridicule qui fait de sainte Eugénie de Rome une « personne trans », ni de la bourde qui prouve que ce sujet n’intéresse pas l’historien. Nous nous contentons de mettre le texte intégral de la chronique de M. Noiriel en regard de ses « emprunts » transparents à l’activiste Chloé Maillet et à Wikipedia:

« Avez-vous vu le moine qui montre ses seins dans la basilique de Vézelay? »
[Chronique de Gérard Noiriel sur France Culture, « Le Pourquoi du comment : histoire » du 29 mars 2022]

Le souci récent de combattre les préjugés qui alimentent cette forme de discrimination qu’on nomme la « transphobie » a conduit un petit nombre d’historiens à s’interroger sur la manière dont la question s’était posée dans le passé. Ces recherches ont montré que la transidentité n’était pas un phénomène nouveau, puisqu’on en trouve déjà des exemples dans l’Antiquité. Limitons-nous à ce seul exemple qui concerne le royaume de France à l’époque médiévale.
Lorsque l’on se promène dans la basilique Sainte-Marie-Madeleine de Vézelay, on aperçoit, dans le bas-côté nord, un chapiteau où l’on voit un homme qui montre ses seins. [Gérard Noiriel]

Lorsque l’on chemine dans la basilique Sainte-Marie-Madeleine de Vézelay, on aperçoit, dans le bas-côté nord, le chapiteau où Eugène-Eugénie ouvre son vêtement. [Chloé Maillet]

Il s’agit d’une représentation sculptée d’une scène rappelant l’histoire de Sainte-Eugénie, une vierge qui subit le martyre à Rome en 257, du temps de l’empereur Valérien. Sa légende a été consignée dans des textes rédigés en latin ou en grec aux VIe-VIIe siècles. Fille du proconsul d’Égypte, Eugénie décida de rejoindre une troupe de moines musiciens. Pour pouvoir partager leur vie, elle se fit couper les cheveux, revêtit des habits d’homme et prit le nom d’Eugène. Elle devint très populaire au sein de son monastère, notamment pour ses dons de guérisseuse. Un jour, Mélanthia, une femme qu’Eugénie avait guérie, voulut lui offrir ses charmes parce qu’elle croyait qu’Eugénie était un homme. Humiliée par son refus, Mélanthia l’accusa alors de l’avoir violée. Lors du procès qui s’ensuivit, Eugénie révéla la vérité en déchirant sa tunique pour montrer à la foule un sein qui n’avait rien de masculin. [Gérard Noiriel]

Sainte Eugénie est une vierge qui a subi le martyre à Rome en 257, du temps de l’empereur Valérien. […] Les sources à son sujet sont des Vies d’Eugénie, rédigées en latin ou en grec aux VIe – VIIe siècles. Fille du vicaire d’Égypte Philippe, […] elle entend une prédication et des chants qui la ravissent. Elle décide alors de rejoindre les chanteurs, qui sont des moines, et de mener leur vie. Pour cela, elle se fait couper les cheveux, revêt des habits d’homme et prend le nom d’Eugène. Elle acquiert une grande renommée au sein du monastère, notamment par son pouvoir de guérir les malades. Apprenant cela, une femme nommée Mélanthia, gravement malade, la fait venir chez elle. Eugénie la guérit, mais Mélanthia, persuadée d’avoir un homme en face d’elle, souhaite la récompenser en lui offrant ses charmes. Bien entendu Eugénie refuse, et la dame, humiliée, la fait traîner devant le tribunal en l’accusant d’avoir voulu la violer. […] Eugénie décide de révéler la vérité : elle déchire sa tunique, montrant à la foule un sein qui n’a rien de masculin. [Wikipedia]

C’est cette scène du procès qui est représentée sur le chapiteau de Vézelay. À la gauche d’Eugénie se trouve le juge, et à sa droite la femme qui l’accuse. Eugénie fut acquittée, mais elle se convertit ensuite au christianisme, et c’est ce qui causa sa perte. [Gérard Noiriel]

Par cette incohérence, Gérard Noiriel montre qu’il ne connaît rien à l’histoire d’Eugénie et qu’il a lu trop vite la notice Wikipedia. Ce sont ses proches et en particulier son père qui se convertissent à ce moment, mais Eugénie s’est évidemment déjà convertie au début du récit, sinon elle ne serait jamais devenue moine! [ndlr]

Étant donné qu’aujourd’hui, la binarité des genres masculin-féminin semble intrinsèque au christianisme, il peut paraître surprenant qu’un tel changement d’identité ait été possible au Moyen Âge. Pourtant, depuis la fin de l’Antiquité chrétienne, les exemples romancés ou réels de personnes assignées femmes ayant volontairement ou non pris l’habit et l’identité d’homme, parfois durant leur vie entière, n’était pas rares. [Gérard Noiriel]

En revanche, qu’un tel changement d’identité ait été possible au Moyen Âge nous surprend, tant la binarité de genre semble intrinsèque au christianisme contemporain. Pourtant, depuis la fin de l’Antiquité chrétienne, les exemples, romancés et/ou réels, de personnes assignées femmes ayant volontairement ou non pris l’habit et l’identité d’hommes, parfois durant leur vie entière, sont bien identifiés. [Chloé Maillet]

Cet exercice de psittacisme woke permet à Gérard Noiriel de bien s’approprier la novlangue. On ne dit plus femme (quelle horreur!), mais on dit personne assignée femme si l’on veut faire la preuve de son conformisme idéologique. [ndlr]

Des femmes réputées viriles, parfois appelées viragines, virago au singulier, dirigeaient des armées, comme ce fut le cas pour Mathilde de Toscane au XIe siècle. Au-delà d’Eugène-Eugénie, plus d’une trentaine de saintes ont été célébrées par l’Église alors qu’elles avaient porté un habit masculin. [Gérard Noiriel]

Des personnes réputées « viriles », parfois appelées viragines (virago au singulier), dirigeaient des armées (Mathilde de Canossa). Plus d’une trentaine de personnes saintes ont même fait leur parcours de gloire en portant un habit masculin, l’Église les ayant reconnues et leur ayant rendu un culte. [Chloé Maillet]

Attention! Il y a une erreur de novlangue! Vous écrivez « femmes réputées viriles », là où votre source donnait « personnes réputées “viriles” ». Les femmes n’existent pas, comme chacun·e sait. Encore un effort, Monsieur Noiriel, et vous y arriverez. [ndlr]

D’un point de vue sociologique, on peut penser que c’est le croisement entre cette tradition de virilité féminine et l’idée d’une féminisation des moines qui a permis l’émergence de la figure transgenre sculptée à Vézelay. [Gérard Noiriel]

Le croisement entre tradition de virilité féminine et l’idée d’une féminisation des moines a pu permettre l’émergence de cette figure transgenre. [Chloé Maillet]

Néanmoins, il ne faut pas exagérer l’importance du phénomène. Au Moyen Âge, le fait de porter les habits de l’autre genre était puni par la loi et la transidentité, bien qu’elle puisse se référer à un idéal de vie remontant au paléochristianisme, ne pouvait être vécue que de manière exceptionnelle, illicite ou cachée. Comme on l’a vu dans une autre chronique, Jeanne d’Arc fut brûlée comme sorcière notamment parce qu’elle avait endossé la tenue militaire réservée aux hommes. [Gérard Noiriel]

Il reste qu’à cette époque porter les habits de l’autre genre était puni par la loi et la transidentité, bien qu’elle puisse se référer à un idéal de vie remontant au paléochristianisme, ne pouvait être vécue que de manière exceptionnelle, illicite ou cachée. Cela ne veut pas dire qu’elle n’existait pas. Ces cas restent l’exception dans le monde du xiie siècle mais ils peuvent être envisagés comme un véritable laboratoire du genre. [Chloé Maillet]

@GerardNoiriel
@ClovisMaillet
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