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Théologien « inclusif », ou le Cuistre en croix

Théologien « inclusif », ou le Cuistre en croix

[par Guillaume PRONESTI]

Le wokisme n’est jamais si loufoque que quand la religion s’en mêle. On connaissait le comique « Amen – Awomen » d’un homme politique américain : cette fois, c’est le journal La Croix qui nous propose… un « Notre Père plus inclusif  ».

L’auteur est un certain Olivier Bauer, « pasteur et théologien protestant » de profession… mais woke de confession. Je n’exagère pas : tout doit être réécrit pour s’accorder avec sa nouvelle religion terrestre : prières, Evangiles… et même Dieu.

Pour le justifier, il adopte les méthode des partisans de l’écriture inclusive : faire mentir les textes jusqu’à pouvoir prouver que la religion « ne respecte pas les femmes ». Tout comme la langue « masculiniste », elle peut être ensuite refaçonnée et politisée sans remords…

… mais d’une drôle de manière : travaillé par la hantise (avouée) de ne pas être assez progressiste, notre pasteur rejette même Vérité, Bien et Mal, et finit de réduire la religion à une hilarante parodie de coaching en bien-être, qui n’a plus de « protestantisme » que le nom – fort utile, on le verra.

Une théologie « inclusive »… mais surtout fictive

Le « Notre Père inclusif » n’est d’ailleurs qu’un prétexte : il s’agit de faire du virtue-signalling progressiste à l’aide de justifications religieuses… totalement inventées.

Olivier Bauer assène d’abord que nous devrions dire « Dieu notre Mère »… mais daigne ajouter « et notre Père » parce que « un homme, ou du moins son sperme sont nécessaires pour co-concevoir un enfant ». La comparaison est absurde (Dieu n’est pas un homme…), mais permet à M. Bauer de se poser, mine de rien, en défenseur de la PMA sans père.

Suit un curieux passage sur la parentalité adoptive qui n’a aucun sens non plus – un Créateur est tout sauf un père « adoptif » – mais permet d’afficher sur dix lignes son soutien à une filiation « au-delà du biologique », en clair l’adoption par les homosexuels et trans.

La rectification suivante est « Pardonnons à ceux ET CELLES... »… sous prétexte qu’il serait « temps de traiter les femmes en adultes et reconnaître explicitement qu’elles peuvent elles aussi nous offenser » !

Mais enfin, quel chrétien a jamais prétendu que les femmes ne pouvaient pas pécher1? Ce n’est plus de l’invention, c’est du mensonge ! Soit notre « théologien » ne connaît pas un mot de la religion qu’il enseigne… soit il nous prend ouvertement pour des poires.

Il se finit par se trahir en ajoutant «  On ne peut plus simplement affirmer « le masculin inclut le féminin »… antienne connue des inclusivistes. M. Bauer voulait tout simplement réécrire le « Notre Père » en langage inclusif… sous de faux prétextes religieux.

Sur son blog, on découvre d’ailleurs que notre pasteur lui voue un véritable culte. Je n’ai jamais vu une telle débauche de points médians et de iels, bien ostensibles et arrangés avec un soin maniaque. On croirait voir une vieille fille astiquer les bondieuseries que sa tante lui a ramenées de Lourdes.

La prière « inclusive » y indigne d’ailleurs les lecteurs. L’un d’eux rappelle qu’elle est énoncée dans les Évangiles, et par Jésus en personne. Caviarder le Notre Père revient à renier un des principes premier du protestantisme, le « sola scriptura ».

La réponse de notre « théologien » vaut d’être citée : il commence par insinuer que son contradicteur exclut les femmes… car il n’utilise pas sa bien-aimée écriture inclusive. Mais la suite est plus étrange encore :

La notion de « témoignage intérieur du Saint-Esprit existe bien chez certains protestants : c’est l’idée d’une voix intérieure, qui autorise parfois à « ne pas prendre l’Écriture à la lettre… à condition de la prendre au sérieux ».

On ne peut pas dire que M. Bauer le fasse : il évoque ce bien pratique « témoignage » à chaque fois qu’il veut imposer ses vues politiques dans la religion… et n’a plus d’arguments. C’est un joker tiré de sa manche, en somme.

Mais là, il est pris sur le fait : parce qu’on sait précisément qui inspire M. Bauer dans sa réécriture de la Bible : une universitaire française nommée Eliane Viennot, inventeuse de cette novlangue militante dont il suit les préceptes à la lettre.

Préceptes justifiés d’ailleurs par des mensonges historiques avérés : le Saint-Esprit a une drôle d’allure ! Mais M. Bauer ne doit pas trop s’en soucier, lui qu’on vient de voir falsifier des arguments théologiques pour traduire le « Notre Père » en écriture inclusive.

Et plus encore que le langage d’E. Viennot, Olivier Bauer va copier ses méthodes. Elle crie à la « masculinisation du français », pourtant impossibilité linguistique, pour justifier une réforme militante du langage ? Lui va affirmer que « la Bible n’est pas d’essence divine » – contre tous les principes du protestantisme – pour la réécrire façon woke.

Pas d’Écriture Sainte… et des Commandements à la carte

Lors d’un prêche de 2018, on voit notre pasteur tenir un drôle de langage : la Bible n’est pas la Parole de Dieu… mais une égalitaire « collection de textes écrits » par des hommes. Trop d’hommes d’ailleurs – M. Bauer a décidément l’art du virtue-signalling incongru.

Avec des signets verts et roses, la Bible cesse d’être un objet fétiche. Elle cesse d’être la Parole de Dieu, avec un très grand «P» à prendre ou à laisser, à croire ou à jeter.

Elle devient ce qu’elle est : une bibliothèque, une collection des textes, une sélection de récits, de poèmes, de réflexions où des hommes, et malheureusement trop peu de femmes, expriment leur relation à Dieu.

O. Bauer, prédication de 2018 à Auvernier

Dans cette collection de textes, nous explique le pasteur Bauer, nous pouvons choisir les versets qui nous plaisent : la Bible à la carte, quoi de plus inclusif ? A chaque commandement de Dieu, nous pouvons dire « j’agree » ou je disagree ».


Car les signets roses ou verts sont propres à chacune et à chacun. C’est toujours un «je» qui agree ou qui disagree. Personne ne peut décider de placer les signets pour quelqu’un d’autre.

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Notre théologien ignore donc que rejeter le concept d’Écritures Saintes, ce n’est pas être « très peu biblique » : c’est ne plus être chrétien du tout.

Mais pourquoi donc insister à désacraliser la Bible ? Il faut remonter un peu plus haut, là où M. Bauer déclare vouloir expurger la Bible des versets qui ne lui plaisent pas.

Car certaines pages ne méritent pas de figurer [dans la Bible]. Et j’ai envie de les arracher.

Arracher les pages qui font croire que Dieu demande à un père de sacrifier son fils, […] que Dieu demande de massacrer tous les ennemis, hommes, femmes et enfants, […] que Dieu donne la vie et la reprend, […] que Dieu fait de la femme l’esclave de son mari et de ses enfants […] où Paul fait croire que l’esclavage est légitime !

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Réécrire une œuvre divine, c’est gênant : beaucoup moins si c’est un simple recueil composé par des hommes – et sans respect de la parité d’ailleurs.

De là le côté grotesque et forcé des accusations de M. Bauer. A quelques passages violents de l’Ancien Testament (le Dieu de Moïse n’est pas un tendre), il mêle contre-vérités notoires (Paul n’a jamais « justifié l’esclavage »), scènes symboliques prises au pied de la lettre (le sacrifice d’Abraham)… tout est bon pour noircir l’Écriture Sainte et en justifier le rewriting.

Madame Viennot a sa bête noire, le grammairien Vaugelas : Olivier Bauer se sert lui de Saint Paul2. Mais la méthode est la même : trouver une poignée de citations machistes, gonfler leur nombre en prenant d’autres à contresens, puis les prétexter pour réécrire religion et langue entières façon woke.

Pasteur sans foi, Dieu mécanique

Notre pasteur trahit ses véritables intentions quand il en profite pour purger de la Bible des versets qui ni sexistes ni violents : comme par exemple… la définition même du Créateur (« Dieu donne la vue et la reprend ») !

Expulser Dieu de la Bible, c’est déjà saugrenu… mais moins que la nonchalance totale de la manière.
Notre théologien liquide un dogme fondamental de sa propre religion, sans explication… mais surtout sans le moindre frémissement intérieur.

Plus loin, il évoque tout aussi froidement le « mauvais Dieu » (sic) présent dans les mauvais versets de la Bible. Le moins pratiquant des chrétiens serait mal à l’aise : le pasteur Bauer s’en fiche. C’est un mystère !

La réponse est simple : la religiosité ne travaille guère M. Bauer : on la cherche en vain sur son blog, ses cours ou ses prêches. Notre médiatique théologien s’exprime volontiers, sur de nombreux sujets religieux ou profanes… mais on ny perçoit jamais la moindre trace d’inquiétude spirituelle.

M. Bauer a de la religion une vision toute matérialiste. Cinq mille ans de spiritualité juive et chrétienne lui passent sous le nez : ellen’est pour lui qu’un outil, dont la seul intérêt est l’influence qu’elle a eu sur le monde : pas ce qu’elle dit, ce qu’elle « a fait croire ».

Voilà pourquoi il la purge sans remords des versets « obsolètes » (sic). Quand au Notre Père, une correction vaticane mineure de 2017 a « prouvé qu’il était modifiable » (sic) : la religion est une machine, à recycler aussitôt si elle empêche de suivre « un monde qui change ».

Ainsi du concept de Dieu créateur : si M. Bauer l’abandonne, c’est parce qu’il a inventé un autre concept : le « Dieu père adoptif et mère biologique3 » (sic), plus inclusif et même LGBT-friendly (on a vu qu’il autorisait une filiation « au-delà du biologique »). Il jette donc l’ancien Dieu à la poubelle, aussi facilement qu’on remplace un vieux téléphone par un neuf.

Le protestantisme « sauce Bauer » devient si utilitaire et mondain… qu’il faut le tenir à jour régulièrement. Ainsi, pour notre pasteur, la bonne religion n’est pas fondée sur des principes… mais sur l’opinion de ses fidèles dans l’avenir. C’est si vite dépassé, ces petites choses-là !

Moi aussi, je crois mal en Dieu. Moi aussi, je crois dans un mauvais Dieu. Quel jugement portera-t-on sur ma théologie dans cent ans, si jamais on s’en souvient ? On dira : «Comment Olivier Bauer a-t-il pu croire à ou croire que ou croire en…?»

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Pour la première fois, on sent une souffrance spirituelle. Oh la douleur du bon M. Bauer, incapable de prédire quel sera le progressisme à la mode dans cent ans pour pouvoir y souscrire par avance !

La (cuistre) fuite en avant par peur de l’Avenir

L’avenir pourrait le juger « réactionnaire » – mot horrible ! On comprend maintenant pourquoi notre bon pasteur se hâte d’être plus woke que woke : écriture inclusive impeccablement léchée, « Notre Père » pro-PMA, et virtue-signalling même aux moments les plus inattendus.

Le résultat est cocasse : on voit M. Bauer accuser Jésus de discriminer les sourds à cause de « Qui a des oreilles entende ». Ou bannir l’expression « société paralysée »… pour ne pas offenser les infirmes !

Mais s’autoriser finalement « handicapée »… parce qu’une association l’a dit avant lui : prouvant ainsi que notre pasteur se soucie moins des paralysés que d’être couvert par les règles du politiquement correct.

Notons que les appels des associations des dyslexiques à ne pas utiliser cette « écriture inclusive » qui les exclut, tombent, eux, dans l’oreille du pire des malentendants. Pour M. Bauer, certains handicapés sont plus égaux que d’autres…

A courir après «un monde qui change », M. Bauer perd tout sens du ridicule. En témoigne la conférence, où le digne et chenu pasteur, tout heureux d’avoir purgé de la Bible les versets du « mauvais Dieu »… se met soudain à chantonner sur l’air de « Libéré, délivré ! » du dessin animé la Reine des Neiges. Son Saint-Esprit a l’inspiration farceuse : soit Eliane Viennot, soit Walt Disney…

Son culte (messe protestante) même est vendue comme une séance de développement personnel : entre spectacle de funambules et motivation speech, vous pourrez très éventuellement « découvrir un texte vieux de 2000 ans » : la Bible désacralisée par le pasteur Bauer.

Et le comble de la cuistrerie : venez, vous pourrez « vous sentir béni » ! La bénédiction de Dieu réduite à du feel good de mauvais coach en entreprise… M. Bauer ne manque vraiment jamais une occasion de prostituer la religion : d’abord à son idéologie, ensuite pour racoler les passants.

Si ce n’est pas l’inverse, d’ailleurs. Pour bénir les couples gays, son argument massue est… 71 : le trop faible nombre de mariages dans son Église, qu’une politique plus inclusive pourrait augmenter. Les arguments pro-LGBT+ même viennent loin derrière… on finit par se demander si cette foi-là, aussi, n’est pas de circonstance.

M. Bauer achève sa transformation en coach de vie très hype en donnant sa définition de la religion : un «christianisme qui fait du bien » (sic). Pas le Biendu bien, du bête bien-être. Il le répète souvent – surtout quand on lui fait remarquer qu’il jette le protestantisme aux orties. Et assure qu’il a la caution de… Jésus.

Or Jésus faisait tout le contraire : le christianisme entier est un immense appel à ne pas reculer devant le scandale quand la Vérité l’exige, quitte à fouetter les marchands du Temple et à finir crucifié comme un assassin. M. Bauer prêche lui que « la vérité est toujours subjective »(sic !) 4, que « ni le bien ni le mal ne sont définitifs » 5… et ose le faire au nom du Christ : c’est à vomir.

Notons que la vérité n’est relative que pour Dieu, la Morale, choses sans importance… et surtout pour les autres ! Parce que si la religion de M. Bauer est inclusive, ses cours de théologie sont eux… d’un prosélytisme outrancier. En témoignent les « questions » posées à ses étudiants :

Les protestants d’autres tendances doivent apprécier cette marque de tolérance religieuse à l’envers. Prétendre ensuite « ne vouloir imposer ses vues à personne6», c’est assez Tartuffe… mais tellement woke : réclamer l’ouverture d’esprit pour soi afin de mieux la refuser aux autres.

Conclusion

Qu’on s’entende bien : M. Bauer a parfaitement le droit de prêcher ce qu’il veut : que l’Écriture n’est pas Sainte, que Dieu n’est pas un Créateur, que la Vérité, le Bien et le Mal sont des notions relatives… et même de réduire sa religion à un happiness coaching inclusif et déconstruit.

M. Bauer a tous les droits… sauf celui de mentir à propos des textes pour servir son militantisme. Et surtout de se prétendre encore chrétien et protestant (même libéral) alors qu’il rejette tout de cette religion, pour n’en garder que le nom et les prébendes associées.

Car la séparation de l’Église et de l’État n’est pas la même qu’en France dans le canton de Vaud : par l’impôt, les contribuables du canton financent donc à la fois un pasteur protestant qui renie ses principes et un théologien qui n’hésite pas à faire mentir les textes qu’il est payé pour étudier. Ce n’est pas donc pas un problème de foi, mais de mésusage des fonds publics.

Et hélas un comportement typique des wokes : faire passer de l’agit-prop pour de la recherche, en nier même les principes fondamentaux comme l’objectivité… mais tenir à poser encore en « sociologues » et « linguistes » pour garder audience et sécurité de l’emploi. Après les « militants-chercheurs », voici le « militant-pasteur ».

Que notre « théologien » enseigne à l’université de Lausanne ne me surprend pas : c’est là même prêche Pascal Gygax, pape suisse du langage inclusif, en s’appuyant lui aussi sur des arguments truqués. J’ignore si M. Bauer a encore une religion, mais je sais à quelle chapelle il appartient.

Auteur

  1. L’« offense » du Notre Père désigne en fait le péché, « debita » dans l’original latin : le péché est entendu comme une « dette » envers Dieu, et ici ses semblables.

  2. https://olivierbauer.org/2016/09/13/soit-je-respecte-la-bible-soit-je-respecte-les-femmes/

  3. https://wp.unil.ch/lescahiersiltp/eduquer-former/o-bauer-une-education-a-ia-foi-de-la-foi-dans-la-foi-et-par-la-foi-2016/

  4. https://olivierbauer.org/2018/11/16/conjuguer-levangile-les-modes/

  5. https://olivierbauer.org/2018/11/16/conjuguer-levangile-les-modes/

  6. https://olivierbauer.org/2013/10/22/etre-protestant-ou-etre-reforme/

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