[par Xavier-Laurent Salvador]
Le décolonialisme est un jugement éthique porté sur une part de la production scientifique partant du constat qu’un ensemble d’auteurs s’accordent aujourd’hui pour considérer que la race mentale et le genre mental sont des observables en science qui justifient la démonstration d’un rapport de dominant-dominé entre les blancs et assimilés sur les non-blancs. Ce rapport de domination mentale, appelé « colonialisme », justifie selon eux que l’on dise que la décolonisation n’a jamais eu lieu, puisque c’est un processus mental réactualisé en permanence dans les rapports sociaux. De cette définition découle une idée simple: éduquer, c’est coloniser un esprit. Or coloniser, c’est mal. Donc éduquer, c’est mal.
C’est un discours qui vise à atteindre le principe même de la démocratie en contestant ce que Yahya, le penseur du CCIF entre autres, appelait lui-même dans sa conférence à Paris 13 sur la Laïcité radicale la « dictature de la majorité » en promouvant un principe simple: celui de la supériorité de la minorité sur le discours majoritaire. Il permet la main mise sur l’administration par l’intimidation et la menace qui décridibilise toute majorité. C’est le coeur des réformes inclusives qui visent à intranquiliser la langue française en mettant à bas la construction de la grammaire (c’est l’illustration de l’abbau Heideggerien); c’est le coeur des menaces qui pèsent sur les arts et la Culture en général dès lors qu’ils peuvent être soupçonnés de représenter le majoritaire; c’est l’exalatation du particularisme contre l’universalisme défait; c’est la subversion de l’idée d’un féminisme émancipateur au profit d’une exaltation des particularismes de la race mentale – ce nouveau destin. En un dernier mot, c’est la victoire du marché où chacun est satisfait individuellement – comble du capitalisme joyeux – contre le sacrifice individuel au profit de l’intérêt général, qui est la définition de la politique. À ce jeu, les extrêmes se rejoignent pour lutter communément contre la liberté de la nation à déterminer son destin: les victoires des minorités religieuses d’aujourd’hui sont celles de la Rome de demain; celles des groupuscules d’hier annoncent celles des masses en colère d’après-demain.
On l’a vu très récemment, à la modeste échelle de l’Observatoire, lorsque l’un d’entre nous fut attaqué dans les colonnes d’un fascicule d’extrême-droite pour son engagement de toujours pour la cause universaliste – dès lors qu’on prend le risque d’affirmer la suprématie de la majorité générale sur l’avis particulier, on s’expose à être attaqué de toutes parts. L’antisémitisme, la déterstation de la République: tout s’y retrouvait joyeusement mêlé. Les mots n’étaient pourtant pas si différents de ceux qui, se prétendant sinistres, accusaient l’Observatoire de tous les maux au moment de sa naissance. Mais on voit aujourd’hui qui pratique la dénonciation par listes, qui attaque les publications en ligne, qui traite de « vieillards », qui manie l’insulte et la calomnie sur les réseaux, qui demande l’effacement des textes écrits en dévoyant les principes de neutralité de la littérature encyclopédique. Il faudrait à ces gens, qui n’ont pour seule excuse que leur inculture, tendre un miroir comme celui de Goya dans Las Viejas – un Qué tal ? de circonstances :
Et pendant ce temps, pendant que d’un côté de l’Atlantique on ouvre la semaine de la laïcité – comme si un principe constitutionnel pouvait se « sloganiser » ou être débattu par des Happy Fews – de l’autre côté on défend l’urgence de « déconstruire notre propre histoire. »
« Déconstruire notre histoire » ! Ce sont des mots qui heurtent non ? Autant préparer l’avenir, on veut bien, autant « déconstruire le passé »: non ! D’ailleurs, voilà un film que nous autres, les descendants de familles d’Amérique Centrale, faisons regarder à nos enfants tous les 6 mois – pour être sûrs…