« Il y a urgence à décoloniser la langue »

« Il y a urgence à décoloniser la langue »

Collectif

Tribune des observateurs

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« Il y a urgence à décoloniser la langue »

[par Francis Éponge]

De nombreux et spectaculaires progrès ont pu être accomplis ces derniers temps grâce aux brillants travaux de nos collègues de l’Université française afin d’introduire une meilleure prise en compte de la diversité dans la langue française via notamment l’écriture inclusive. Il est vrai que jusqu’en 2016, la langue française ne permettait pas de nommer les populations autres que blanches, hétéro-patriarcales, masculines et cis-genrées. Ainsi, quand Copi écrit les 4 jumelles, il est flagrant de constater qu’il lui est impossible de trouver les mots pour parler de femmes, de sœurs ou de drogues. C’est là le fruit d’une gynophobie d’Etat systémique et honteuse.

Quand Boris Vian évoque la sexualité dans son œuvre, il ne peut le faire1 qu’en ne parlant que de l’hétérosexualité qui alimente son fantasme masculiniste principal: les mots lui manquant pour envisager quoi que ce soit d’autre, évidemment, il ne peut pas créer l’œuvre qu’il aurait mérité de créer si seulement il avait eu conscience de l’invisibilisation dont souffraient ceux dont il ne parlait pas.

D’ailleurs, il est frappant de voir que chez Zola comme chez Flaubert, mais n’hésitons pas à aller plus loin: chez Chrétien de Troyes, Guillaume de Loris ou Nicole de Margival ! Il n’est jamais question de femme; jamais question d’homosexualité; jamais question de culture étrangère à la culture patriarcale blanche franco-française.

Quand Gide écrit:

Le vêtement tomba ; il rejeta au loin sa veste, et se dressa nu comme un dieu. Un instant il tendit vers le ciel ses bras grêles, puis, en riant, se laissa tomber contre moi. Son corps était peut-être brûlant, mais parut à mes mains aussi rafraîchissant que l’ombre. Que le sable était beau ! Dans la splendeur adorable du soir, de quels rayons se vêtait ma joie !…
Cependant il se faisait tard ; il fallait rejoindre Paul. Sans doute mon aspect portait-il la marque de mon délire, et je crois bien qu’il se douta de quelque chose ; mais, comme, par discrétion peut-être, il ne me questionnait pas, je n’osai lui raconter rien.

(SV, p. 280)

Il est indéniable qu’il parle d’un homme: mais c’est parce que les mots lui manquent pour en réalité parler de la femme dont il rêvait et qui est invisibilisée par la langue française elle-même qui pour se dire au féminin est en réalité le fruit d’un complot historique majeur2. Bref, un gros travail a déjà été accompli, mais nous pouvons aller plus loin !

Les noms, les mots

On parle beaucoup des prénoms aujourd’hui, c’est un fait. Il y aurait des prénoms à consonance étrangère que certains candidats à la Présidentielle souhaiteraient voir disparaître du paysage: Alexander, Sacha, Mohamed ou Chang seraient des prénoms connotés d’exotisme.

Mais ne voient-ils pas ces gens-là qu’au contraire ces prénoms sont le fruit d’un odieux colonialisme qu’il faut absolument combattre ? Ne voient-ils pas que l’alphabet latin imposé à ces prénoms est une insulte faite à leur culture ? Il est donc temps de décoloniser l’alphabet et de rendre à محمد ou جمال, 常 et Александр ce qui leur est propre.

Voilà pourquoi il faut décoloniser l’alphabet et l’écriture: permettre de visibiliser la richesse des cultures. Et si les instituteurs de demain ne savent pas enseigner à ces enfants dans la langue qui est la leur: alors privatisons l’enseignement, et rendons aux communautés locales le pouvoir d’enseigner ce qui les émancipe plutôt que ce qui les aliène à une culture allogène !

Voilà.

Et demain, nous vous expliquerons pourquoi il faut privilégier la prise en compte de la race dans les publications scientifiques en oncologie3.

Auteur

Notes de Bas de page

  1. https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-00730506

  2. https://www.lefigaro.fr/vox/societe/2017/09/26/31003-20170926ARTFIG00091-voir-un-complot-machiste-dans-la-langue-francaise-manifeste-une-totale-ignorance.php

  3. https://www.nature.com/articles/d41586-022-00426-7

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    Soutien à notre collègue Bergeaud-Blackler

    Florence Bergeaud-Blackler, chercheuse au CNRS, devait donner une conférence à l’Université de Lille sur un sujet brûlant : l’influence des Frères musulmans et l’entrisme islamiste dans certains syndicats et mouvements de gauche. Pourtant, sa conférence a été annulée. Cette décision, prise par le doyen, est un acte politique qui ne dit pas son nom. Une fois de plus, l’université cède aux pressions idéologiques et sacrifie le débat scientifique sur l’autel du conformisme militant.
     
    Cette annulation n’est pas un cas isolé. Elle s’inscrit dans un climat où toute critique de l’islamisme est immédiatement disqualifiée, où ceux qui osent poser des questions sont taxés de “racistes” ou d’“extrême droite”. Dans les sciences sociales, en particulier, la règle tacite est claire : on se soumet ou on dégage. Ceux qui refusent de plier sont mis à l’écart, leurs conférences interdites, leurs noms jetés en pâture à des étudiants dressés à confondre débat intellectuel et offense personnelle.
     
    Comment expliquer que des syndicats, censés défendre la liberté d’expression, se soient transformés en gardiens du dogme ? Pourquoi tant de collègues se taisent, sinon par peur ? Cette lâcheté collective est précisément ce qui permet aux censeurs d’imposer leur loi. Mais il faut le dire : l’Université ne peut pas devenir un espace clos où seuls certains discours sont autorisés.
     
    Face à cette censure, la chercheuse a décidé de maintenir sa conférence, ailleurs s’il le faut. Le débat aura lieu le 5 mars, avec le plus grand nombre possible de participants. Car la lutte contre l’islamisme et ses complicités idéologiques n’est pas une affaire de partis : c’est une question existentielle pour notre démocratie.
    L’Université doit rester un lieu de savoir et d’échange, pas un bastion du sectarisme.