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Ségrégation : pourquoi un ministre ne devrait pas dire ça

Ségrégation : pourquoi un ministre ne devrait pas dire ça

Alexandre Portier

Ministre délégué à la réussite scolaire, Député du Rhône (9e circonscription). Membre de la commission des affaires culturelles et de l'éducation.

Tribune. Alexandre Portier, député LR du Rhône et membre du Conseil supérieur des programmes, réagit à l’emploi du terme « ségrégation scolaire » par le ministre de l’Éducation nationale.

La révolution tant annoncée en matière de mixité scolaire a fini en pantalonnade. Mais tout n’est pas perdu pour le ministre. Ce que Pap NDIAYE perd politiquement, en façade, il le gagne idéologiquement, sur le terrain des idées qu’il impose. Aujourd’hui, celle de ségrégation.

Une guerre scolaire a bien eu lieu Pour s’en convaincre, il suffit de lire le dossier de presse du ministère. Toute la pensée officielle du patron de la rue de Grenelle y repose sur cette notion de ségrégation. Pap
NDIAYE a lui-même affirmé sur France Culture que « la France est un des pays de l’OCDE où la ségrégation scolaire est la plus forte ». Ce n’est donc pas une erreur, mais bien le point cardinal de la doctrine ministérielle.

Si l’objectif était d’imposer cette lecture sociologique dans le débat, l’opération est réussie. Toute la presse l’a reprise massivement. Derrière cette tragi-comédie sur la mixité, notre histoire scolaire a donc vécu un moment politique. Oui, ne nous y trompons pas, une guerre scolaire a bien eu lieu.

La fenêtre d’Overton s’est élargie très à gauche, voire très à l’ouest. A l’ouest, loin des réalités que vivent les enseignants sur le terrain. Mais à l’ouest, aussi, en imposant une lecture sociale brutalement importée des Etats-Unis.

La ségrégation scolaire, un scandale intellectuel

Pap NDIAYE érige la « ségrégation scolaire » en problème si évident qu’il ne serait même plus à démontrer en France. Or, la notion n’est ni claire, ni opérante.

Comme le soulignait très justement le prix Nobel d’économie Thomas SCHELLING, la ségrégation est un processus qui « découle de l’action organisée, légale ou illégale, par la force ou simplement par l’exclusion » (La tyrannie des petites décisions, 1978). Venue des travaux portant sur les ghettos juifs d’Europe centrale ou sur l’apartheid sud-africain, la notion est censée désigner un acte volontaire, comme le rappelle la racine latine du mot, segregare.

Derrière la pseudo-scientificité dont le ministère pare l’idée de ségrégation, comment ne pas être sidéré de voir un ministre de la République employer un terme qui désignait originellement les politiques d’exclusion qu’ont connu la Pologne de 1940 ou l’Afrique du Sud de 1948 ? Plus grave encore, comment imaginer qu’un ministre de la République puisse affirmer qu’il y ait une action volontaire dans notre pays pour marginaliser une partie de sa population ? Ce n’est pas un accident politique, c’est un scandale intellectuel.

La politique du malade imaginaire

Nous tenons là toute l’idéologie qui domine largement outre-Atlantique, et que Pap NDIAYE, spécialiste de l’histoire américaine qu’il connaît manifestement mieux que l’histoire de France, tente d’imposer dans notre débat public.

L’École est désormais présentée comme un lieu qui institutionnalise les discriminations et qu’il faudrait donc transformer pour y répondre. Or, tout analyser en termes de dominations, voilà bien un trait caractéristique du wokisme, comme le souligne le philosophe Pierre-Henri TAVOILLOT.

Soyons lucides : Pap NDIAYE porte une vision subversive et même négative de l’École.

Loin du positivisme des pères de la République, notre ministre est aux avant-gardes d’un mouvement qui considère que l’École n’est plus là pour transmettre une culture commune : non, l’École est là pour déconstruire des comportements sociaux. Pap NDIAYE est le digne héritier de Najat VALLAUD-BELKACEM.

Une fois de plus, le déni est total. Les élèves ne sont pas vraiment mauvais, juste mal mélangés. Finalement, ce n’est qu’une question de répartition, d’organisation sociale. Cassons les thermomètres ; le mal disparaîtra. Étalons les difficultés, et elles se résoudront comme par magie. C’est la politique du malade imaginaire.

Sauf que lorsque l’on met de manière arbitraire 16 à des élèves en EMC (enseignement moral et civique), alors qu’ils n’ont pas eu cours de l’année, faute de professeur, comme c’est encore arrivé récemment, le problème n’est pas la ségrégation scolaire : c’est bien le pilotage de l’Éducation nationale. Le réel finit toujours par se rappeler à nous.

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