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Censure, toi-même !

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Collectif

Tribune des observateurs

Read More  VALERY HACHE / AFP via Getty Images Photo d’illustration, prise le 31 mars 2021 à Nice lors de la Journée internationale de visibilité transgenre. Photo d’illustration, prise le 31 mars 2021 à Nice lors de la Journée internationale de visibilité transgenre. LGBTQIA – Les psychanalystes C. Eliacheff et C. Masson ont essuyé des déconvenues dans la tournée de promotion de leur livre La fabrique de l’enfant-transgenre, entre flashmobs, critiques acerbes et quelques déprogrammations par des lieux ne souhaitant pas, après examen, propager leur discours. Ces déconvenues sont finalement présentées comme une « violente campagne [les] accusant de transphobie » ou la « censure des petits commissaires politiques », et donnent lieu à de multiples prises de position en ce sens. Ce procès en censure fait aux « transactivistes » s’apparente à un procès en sorcellerie, tant la cause semble entendue. Clarifions la donne : quelqu’un qui a table ouverte au Figaro ou à Marianne, qui prépare une nouvelle saison d’émissions pour Radio France, qui voit sa parole relayée dans toute la presse française, le tout à la satisfaction de ses éditeurs, Odile Jacob, Flammarion et Gallimard, n’est pas une personne censurée. La suite après cette publicité Elle a largement de quoi faire entendre sa voix. Elle en a pleinement le droit, un droit indissociable de la liberté de critiquer. Car il y a de quoi être circonspect sur les positions véhiculées par cet ouvrage. Nous serions, selon lui, face à un « scandale sanitaire », épidémie de transidentité qui se déclarerait du jour au lendemain chez des légions d’adolescentes influencées par « une subculture idéologique contagieuse via les réseaux sociaux, se rapprochant par maints aspects de l’emprise sectaire », rien de moins. Sans contextualiser son affirmation sur l’augmentation des diagnostics, sans s’informer des standards de soin effectivement pratiqués en France, le texte déroule une vision pathologisante de la transidentité, au mépris des positions de l’OMS. La suite après cette publicité Sans s’informer des standards de soin effectivement pratiqués en France, le texte déroule une vision pathologisante de la transidentité C’est le moment de préciser que « transphobe » n’est pas une injure infamante. C’est un énoncé descriptif permettant de désigner des propos comportant, de manière démontrable, des atteintes à la dignité et aux droits des personnes en raison de leur identité de genre. Et c’est bien ça, le risque, quand on diffuse des propos contraires à l’état des pratiques et de la science au sujet d’une population méconnue du grand public. On ne peut ignorer que relayer des accusations hyperboliques à l’encontre des personnes trans, de leurs familles et des professionnels qui les accompagnent, en direction de parents susceptibles de prendre pour argent comptant le savoir-pouvoir d’une « experte » autoproclamée peut avoir de lourds effets délétères. Personne ne peut être exempt de toute responsabilité sur les conséquences sociales de ses propos. Deux années de « polémique chloroquine » et de discours « antivax » auraient dû nous aider, comme citoyens, à avoir plus de distance critique avec la parole « d’experts » sensationnalistes en matière de santé et de soins. La longue histoire des justifications pseudo-scientifiques du racisme, de l’antisémitisme et de la misogynie auraient dû mettre la puce à l’oreille de celles et ceux qui, au nom de l’universalisme et du débat scientifique, défendent contre une censure inexistante la promotion d’un livre éminemment contestable. La suite après cette publicité Le livre en question reprend une vieille ficelle élimée, utilisée par tous les opposants aux droits des personnes LGBTI+ : la protection de l’enfance et de la jeunesse, argument d’autorité à la clef, pour justifier l’ordre social le plus rétrograde et ignorer la dignité des personnes. Avec cette fois-ci pour épouvantail des interventions chirurgicales prétendues automatiques, alors même que ce sont précisément les associations trans qui ont obtenu qu’elles ne soient plus obligatoires. « Nous les prenons très au sérieux les droits et la protection des enfants. Et c’est précisément pour cela que nous n’acceptons pas de nous taire quand ils sont instrumentalisés » Ces thèses ne sont pas des enjeux théoriques, des positions quelconques. Elles s’inscrivent dans le contexte de la panique morale en cours dans les pays anglophones. Les conséquences outre-Atlantique et outre-Manche des « analyses » relayées par Eliacheff et Masson sont désastreuses pour les personnes trans, enfants et jeunes en particulier. Aux États-Unis, 77 propositions de loi au niveau des États sont en cours d’examen ou ont été adoptées pour interdire les traitements médicaux de transition pour les moins de 18 ans. Cela affecte, selon une estimation de mars 2022, 58 200 enfants trans et leurs familles ainsi que 4 000 jeunes adultes. Le coup de force de ces autrices réside dans leur capacité à faire passer leurs positions pour une évidence au nom d’une « autorité scientifique », alors même qu’elles se permettent de disqualifier sans examen les décennies de recherche et d’expérience, et – last but very much not least – la parole des personnes dont elles parlent, celles des enfants et des adultes qui ont besoin des traitements sur lesquels elles jettent l’opprobre. La suite après cette publicité Tout le reste n’est que littérature. Nous ne sommes en aucun cas moins sensibles que d’autres aux droits des enfants ou à leur protection. Nous les prenons, au contraire, très au sérieux. Et c’est précisément pour cela que nous n’acceptons pas de nous taire quand ils sont instrumentalisés au service d’une panique morale dangereuse qui met en danger des enfants parmi les plus exposés à la violence. Quitte à être traités de censeurs. Ont co-signé cette tribune : Flora Bolter et Denis Quinqueton, militants LGBTI+ ; Arnaud Alessandrin, sociologue, Université de Bordeaux ; Mika Alison, enseignante et formatrice Éducation nationale sur les LGBTphobies; Eric Arassus, président de la Fédération sportive LGBT; Fanny Baklouti, membre du bureau de la commission LGBTQIA d’EELV; Nathanaël Bignon, militant LGBTI+; Laurence Brunet, juriste, spécialiste en droit de la famille et de bioéthique, chercheuse  l’Université Paris I Panthéon Sorbonne; Mélissa Camara, membre du bureau exécutif, EELV; Gauthier Caron-Thibault, conseiller de Paris, élu de Paris Centre; Sergio Coronado, ancien député, militant écologiste; Jérôme Courduriès, professeur des universités en anthropologie, Université Toulouse Jean Jaurès; Jérémie Crépel, conseiller municipal écologiste à Lille; Pauline Delage, adjointe au maire du 4e secteur de Marseille; Karine Espineira, sociologue, Université Paris 8; Lucie Fournié, commission Féminisme, EELV; Agnès Freschel, adjointe aux cultures et aux mémoires du premier secteur de Marseille (PCF); Geneviève Garrigos, conseillère de Paris, ancienne présidente d’Amnesty International France; Adrien Gérard, secrétaire général d’HES-Socialistes LGBTI+ ; Céline Gross, militante LGBTI ; Laurence Hérault, anthropologue, professeure à Aix-Marseille Université; Jean-Marie Hupel, militant écologiste; Morgan Jasienski, militant écologiste et LGBQIAP+; Marie-Pierre Julien, sociologue et anthropologue, MCF à l’Université de Lorraine; Jean-Baptiste Lachenal, membre du bureau de la commission LGBTQIA d’EELV; Philippe Lasnier, militant LGBT; Julius Lay, violoniste; Lennie Nicollet, président de HES LGBTI+; Sarah Persil, vice-Présidente de la Région Bourgogne Franche-Comté, co-responsable de la Commission LGBTQIA+ d’EELV; Robin des Doigts, drag king; Sacha Reza, activiste écoféministe et membre d’EELV Féminisme; Gabrielle Richard, sociologue et chercheuse, université Paris-Est Créteil, université du Québec à Montréal; Sophie Roques, adjointe au Maire de Marseille et militante LGBTI+ ; Emma Smith, Support Transgenre Strasbourg; Vanessa Thomas, militante HES LGBTI+; Maud-Yeuse Thomas, chercheure indépendante ; Ludovic Tomas, rédacteur en chef de Zébuline; Sébastien Tüller, militant LGBTI+; Claire Vandendriessche, co-Secrétaire Générale du Réseau Santé Trans; Anne Vial, élue de Marseille, responsable sportive; Anna C. Zielinska, philosophe, maîtresse de conférences à l’Université de Lorraine, enseignante à Sciences-Po Nancy/Paris À voir également sur Le HuffPost : Vous ne pouvez pas visionner ce contenu car :Vous avez refusé les cookies associés aux contenus issus de tiers en vous abonnant. Vous ne pourrez donc pas lire nos vidéos qui ont besoin de cookies tiers pour fonctionner. Vous utilisez un bloqueur de publicité. Nous vous conseillons de le désactiver afin d’accéder à nos vidéos. Si vous n’êtes dans aucun de ces deux cas, contactez-nous à aide@huffingtonpost.fr. 

VALERY HACHE / AFP via Getty Images Photo d’illustration, prise le 31 mars 2021 à Nice lors de la Journée internationale de visibilité transgenre.
Photo d’illustration, prise le 31 mars 2021 à Nice lors de la Journée internationale de visibilité transgenre.

LGBTQIA – Les psychanalystes C. Eliacheff et C. Masson ont essuyé des déconvenues dans la tournée de promotion de leur livre La fabrique de l’enfant-transgenre, entre flashmobs, critiques acerbes et quelques déprogrammations par des lieux ne souhaitant pas, après examen, propager leur discours. Ces déconvenues sont finalement présentées comme une « violente campagne [les] accusant de transphobie » ou la « censure des petits commissaires politiques », et donnent lieu à de multiples prises de position en ce sens.

Ce procès en censure fait aux « transactivistes » s’apparente à un procès en sorcellerie, tant la cause semble entendue. Clarifions la donne : quelqu’un qui a table ouverte au Figaro ou à Marianne, qui prépare une nouvelle saison d’émissions pour Radio France, qui voit sa parole relayée dans toute la presse française, le tout à la satisfaction de ses éditeurs, Odile Jacob, Flammarion et Gallimard, n’est pas une personne censurée.

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Elle a largement de quoi faire entendre sa voix. Elle en a pleinement le droit, un droit indissociable de la liberté de critiquer.

Car il y a de quoi être circonspect sur les positions véhiculées par cet ouvrage. Nous serions, selon lui, face à un « scandale sanitaire », épidémie de transidentité qui se déclarerait du jour au lendemain chez des légions d’adolescentes influencées par « une subculture idéologique contagieuse via les réseaux sociaux, se rapprochant par maints aspects de l’emprise sectaire », rien de moins.

Sans contextualiser son affirmation sur l’augmentation des diagnostics, sans s’informer des standards de soin effectivement pratiqués en France, le texte déroule une vision pathologisante de la transidentité, au mépris des positions de l’OMS.

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Sans s’informer des standards de soin effectivement pratiqués en France, le texte déroule une vision pathologisante de la transidentité

C’est le moment de préciser que « transphobe » n’est pas une injure infamante. C’est un énoncé descriptif permettant de désigner des propos comportant, de manière démontrable, des atteintes à la dignité et aux droits des personnes en raison de leur identité de genre.

Et c’est bien ça, le risque, quand on diffuse des propos contraires à l’état des pratiques et de la science au sujet d’une population méconnue du grand public. On ne peut ignorer que relayer des accusations hyperboliques à l’encontre des personnes trans, de leurs familles et des professionnels qui les accompagnent, en direction de parents susceptibles de prendre pour argent comptant le savoir-pouvoir d’une « experte » autoproclamée peut avoir de lourds effets délétères. Personne ne peut être exempt de toute responsabilité sur les conséquences sociales de ses propos.

Deux années de « polémique chloroquine » et de discours « antivax » auraient dû nous aider, comme citoyens, à avoir plus de distance critique avec la parole « d’experts » sensationnalistes en matière de santé et de soins. La longue histoire des justifications pseudo-scientifiques du racisme, de l’antisémitisme et de la misogynie auraient dû mettre la puce à l’oreille de celles et ceux qui, au nom de l’universalisme et du débat scientifique, défendent contre une censure inexistante la promotion d’un livre éminemment contestable.

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Le livre en question reprend une vieille ficelle élimée, utilisée par tous les opposants aux droits des personnes LGBTI+ : la protection de l’enfance et de la jeunesse, argument d’autorité à la clef, pour justifier l’ordre social le plus rétrograde et ignorer la dignité des personnes. Avec cette fois-ci pour épouvantail des interventions chirurgicales prétendues automatiques, alors même que ce sont précisément les associations trans qui ont obtenu qu’elles ne soient plus obligatoires.

« Nous les prenons très au sérieux les droits et la protection des enfants. Et c’est précisément pour cela que nous n’acceptons pas de nous taire quand ils sont instrumentalisés »

Ces thèses ne sont pas des enjeux théoriques, des positions quelconques. Elles s’inscrivent dans le contexte de la panique morale en cours dans les pays anglophones. Les conséquences outre-Atlantique et outre-Manche des « analyses » relayées par Eliacheff et Masson sont désastreuses pour les personnes trans, enfants et jeunes en particulier. Aux États-Unis, 77 propositions de loi au niveau des États sont en cours d’examen ou ont été adoptées pour interdire les traitements médicaux de transition pour les moins de 18 ans. Cela affecte, selon une estimation de mars 2022, 58 200 enfants trans et leurs familles ainsi que 4 000 jeunes adultes.

Le coup de force de ces autrices réside dans leur capacité à faire passer leurs positions pour une évidence au nom d’une « autorité scientifique », alors même qu’elles se permettent de disqualifier sans examen les décennies de recherche et d’expérience, et – last but very much not least – la parole des personnes dont elles parlent, celles des enfants et des adultes qui ont besoin des traitements sur lesquels elles jettent l’opprobre.

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Tout le reste n’est que littérature. Nous ne sommes en aucun cas moins sensibles que d’autres aux droits des enfants ou à leur protection. Nous les prenons, au contraire, très au sérieux. Et c’est précisément pour cela que nous n’acceptons pas de nous taire quand ils sont instrumentalisés au service d’une panique morale dangereuse qui met en danger des enfants parmi les plus exposés à la violence. Quitte à être traités de censeurs.

Ont co-signé cette tribune : Flora Bolter et Denis Quinqueton, militants LGBTI+ ; Arnaud Alessandrin, sociologue, Université de Bordeaux ; Mika Alison, enseignante et formatrice Éducation nationale sur les LGBTphobies; Eric Arassus, président de la Fédération sportive LGBT; Fanny Baklouti, membre du bureau de la commission LGBTQIA d’EELV; Nathanaël Bignon, militant LGBTI+; Laurence Brunet, juriste, spécialiste en droit de la famille et de bioéthique, chercheuse  l’Université Paris I Panthéon Sorbonne; Mélissa Camara, membre du bureau exécutif, EELV; Gauthier Caron-Thibault, conseiller de Paris, élu de Paris Centre; Sergio Coronado, ancien député, militant écologiste; Jérôme Courduriès, professeur des universités en anthropologie, Université Toulouse Jean Jaurès; Jérémie Crépel, conseiller municipal écologiste à Lille; Pauline Delage, adjointe au maire du 4e secteur de Marseille; Karine Espineira, sociologue, Université Paris 8; Lucie Fournié, commission Féminisme, EELV; Agnès Freschel, adjointe aux cultures et aux mémoires du premier secteur de Marseille (PCF); Geneviève Garrigos, conseillère de Paris, ancienne présidente d’Amnesty International France; Adrien Gérard, secrétaire général d’HES-Socialistes LGBTI+ ; Céline Gross, militante LGBTI ; Laurence Hérault, anthropologue, professeure à Aix-Marseille Université; Jean-Marie Hupel, militant écologiste; Morgan Jasienski, militant écologiste et LGBQIAP+; Marie-Pierre Julien, sociologue et anthropologue, MCF à l’Université de Lorraine; Jean-Baptiste Lachenal, membre du bureau de la commission LGBTQIA d’EELV; Philippe Lasnier, militant LGBT; Julius Lay, violoniste; Lennie Nicollet, président de HES LGBTI+; Sarah Persil, vice-Présidente de la Région Bourgogne Franche-Comté, co-responsable de la Commission LGBTQIA+ d’EELV; Robin des Doigts, drag king; Sacha Reza, activiste écoféministe et membre d’EELV Féminisme; Gabrielle Richard, sociologue et chercheuse, université Paris-Est Créteil, université du Québec à Montréal; Sophie Roques, adjointe au Maire de Marseille et militante LGBTI+ ; Emma Smith, Support Transgenre Strasbourg; Vanessa Thomas, militante HES LGBTI+; Maud-Yeuse Thomas, chercheure indépendante ; Ludovic Tomas, rédacteur en chef de Zébuline; Sébastien Tüller, militant LGBTI+; Claire Vandendriessche, co-Secrétaire Générale du Réseau Santé Trans; Anne Vial, élue de Marseille, responsable sportive; Anna C. Zielinska, philosophe, maîtresse de conférences à l’Université de Lorraine, enseignante à Sciences-Po Nancy/Paris

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