Retour sur les progrès de la Cancel Culture, avec la Revue de presse de l’Observatoire du décolonialisme du 1er au 7 février 2021
Cette semaine, on a annulé:
- La nudité en art, considérée par 39% des Français qui ont entre 18 et 24 ans comme «une manière de véhiculer une iconographie machiste»: «Il y a un risque de censure ou d’autocensure de l’expression artistique» (Le Journal des Arts) et «L’art et la manière» (France Culture)
- 44 noms d’école à San Francisco: «San Francisco va débaptiser un tiers de ses écoles, aux noms désormais controversés» (Le Monde)
- Les mascottes sportives faisant référence à l’imagerie amérindienne: «Redskins, Indians, Chiefs: l’imagerie amérindienne recule dans le sport américain» (TV5Monde)
- L’humour transgressif, c’est-à-dire le rire: «“Rares sont les humoristes à oser la transgression”: à Montréal, la crise du rire» (Le Monde)
- Le chanteur Marilyn Manson, lâché par ses agents et coupé de deux séries télévisées après des accusations d’abus sexuels: «Marilyn Manson effacé de deux séries télévisées» (Le Matin)
- L’Antiquité, que Dan-el Padilla Peralta, professeur d’études classiques à Princeton, entreprend de déblanchir et de décoloniser, «même si cela signifie la destruction de sa discipline»: «He Wants to Save Classics From Whiteness. Can the Field Survive?» (The New York Times)
Retrouvez toutes ces infos et beaucoup d’autres sur la Revue de presse de l’Observatoire du décolonialisme du 1er au 7 février 2021
# Fahrenheit 451
À l’heure où l’Université de Princeton envisage la «destruction» du champ des études antiques, jugées trop blanches par la Cancel Culture, l’Observatoire du décolonialisme vous offre la lecture de ce poème de Rainer Maria Rilke:
TORSE ARCHAÏQUE D’APOLLON
Nous n’avons pas connu sa tête inouïe,
où mûrissaient les prunelles. Mais
son torse rayonne encore comme un candélabre,
où son regard, d’une source plus reculée,
se dresse et luit. Sinon, l’arc de la poitrine
n’aurait pu t’éblouir, et de la calme torsion
des lombes ne pourrait monter un sourire
à ce centre qui portait le sexe.
Sinon, cette pierre mutilée et raccourcie
ne serait pas debout sous la chute transparente des épaules,
elle n’aurait pas ce flamboiement de pelage félin,
elle ne rayonnerait pas hors de toutes bornes
comme une étoile : car il n’est aucun point de sa surface
qui ne te regarde. Il faut changer ta vie.
Rainer Maria RILKE (traduit par Jean Starobinski)
source: M. Gagnebin et Chr. Savinel (dir.), L’Image récalcitrante,
Paris, Presses de la Sorbonne nouvelle, 2001, p. 70-71.