La Queer Palm

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Tribune des observateurs

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La Queer Palm

Read More  La Queer Palm ne figure pas parmi les récompenses remises officiellement durant le festival. Depuis 2010, ce trophée récompense un film pour son traitement des thématiques LGBTQIA+ parmi ceux présentés dans toutes les sélections confondues.
Est-ce que cette Queer Palm est une bonne idée ? Un coup de projecteur salvateur sur des thématiques et des personnages encore trop peu représentés à l’écran en 2023 ? Ou est-ce que, comme le pense par exemple Xavier Dolan, ce n’est pas contre-productif de distinguer, de mettre comme ça à part un prix LGBTQIA+ ?
Avec Nicolas Maury, acteur, connu du grand public grâce au rôle d’Hervé dans la série Dix pour Cent ; réalisateur, son premier film est sorti il y a trois ans, Garçon Chiffon ; et chanteur, son premier album sorti chez Warner s’appelle La Porcelaine de Limoges. Il a été président du jury de cette Queer Palm à Cannes en 2021.
Qu’est-ce que la Queer Palm ?En 2010, c’est un journaliste Franck Finance-Madureira, qui a inventé la Queer Palm. C’est donc une récompense remise lors du Festival de Cannes hors du reste du palmarès. Mais cette Queer Palm n’est pas totalement décorrélée de la sélection puisque le film qui la recevra fait partie des films choisis par le festival.
En Allemagne, le Teddy Award, l’équivalent de la Queer Palm pour le Festival de Berlin, est intégré au palmarès. En 1987, le premier film à l’avoir reçu, c’est La Loi du désir de Pedro Almodovar, qui n’était pas encore connu. À Cannes, la toute première Queer Palm a été donnée à Kaboom, du réalisateur Gregg Araki. L’an dernier, c’est Joyland, de Saim Sadiq, qui a été récompensée. Cette année, c’est le cinéaste américain John Cameron Mitchell à qui reviendra cette tâche.
Une question de regardLa Queer Palm, c’est un prix comme récompensant des films qui disent quelque chose d’intéressant sur la communauté LGBTQIA+. Nicolas Maury explique ce que, pour lui, queer signifie : « Ce serait comme un pays qui contiendrait quand même une chose liquide et libre sur l’identité, sur les questions de genre ou les réponses aussi. »
Pour lui, c’est plus largement un mouvement artistique libérateur, comme il l’explique : « Il y a des conservatismes dans certaines sélections aussi je trouve. Il n’y a pas un renouvellement forcément des gens qui sont à la tête de certaines sélections. Il faut savoir que tous les festivals internationaux, ils changent en gros tous les quatre ou cinq ans, ce qui est normal. Donc pour moi, queer, c’est aussi inviter à sa table des gens qui normalement ne le sont pas. »
Il revient aussi sur le moment où une des membres du jury de la Queer Palm, en 2011, n’avait pas pu monter les marches de Cannes, car elle portait une combinaison très classe, et des grosses chaussures : « C’est quand même un festival d’art. On peut aussi se calmer sur le côté cannois brushing, satin et puis nœud pap. Enfin, c’est bien, mais c’est aussi à renouveler. Et ça, c’est aussi parfois dans les films eux-mêmes. C’est pour ça que la Queer Palm, c’est toujours un contre-pouvoir aussi. C’est intéressant comme contre-pouvoir. Alors après, s’il devient un jour le pouvoir, c’est chiant peut-être, mais en tant que contre-pouvoir, je trouve ça bien que ça existe. »
C’est une question de regard et non de sujet comme l’explique Nicolas Maury, à propos de la Palme de 2013, La Vie d’Adèle, d’Abdellatif Kechiche : « C’est un immense cinéaste avec qui je rêve un jour peut-être de travailler. Mais je n’ai pas aimé ce film. Je n’aime pas le regard de ce film. Justement, ce n’est pas un regard queer. Et pour vous donner un exemple, de quelqu’un dont l’orientation serait plutôt hétérosexuelle, mais je ne sais pas, c’est Jacques Audiard, avec Les Olympiades. Pour moi, c’est un film queer par exemple, et c’était le premier film d’Audiard que j’ai trouvé queer. C’est un film qui m’a beaucoup étonné parce qu’on n’attendait pas un film comme ça d’Audiard. Il a fait un film très libre, très fluide, très gender fluid. »
Les personnages queer dans la fiction, encore à la marge ?Pour Nicolas Maury, aujourd’hui, on veut remplir toutes les cases : « Il faut qu’il y ait une personne trans, qu’il y ait un personnage rebeu. Il faut qu’il y ait vraiment toutes les cases, même pour le CNC, alors que je trouve qu’on a oublié une chose, c’est qu’un cinéaste, normalement, dans une salle de cinéma, c’est quelqu’un qui domine notre regard. Moi, par exemple, comme spectateur […] j’ai besoin d’être soumis à un regard. Et pour moi, c’est vraiment ça aussi que récompense la Queer Palm, c’est cette signature-là d’un cinéaste*. »*
Pour lui, les personnages queer sont souvent relégués en arrière-plan mais cela est en train de changer : « Je pense que ça tend à changer avec des premiers films absolument majeurs de ces dernières années, avec des cinéastes comme Yann Gonzalez, comme Mikael Buch, ou encore comme Céline Sciamma qui, quand même ouvrent les portes à tout ça. »
Le milieu du cinémaEn fin d’émission, Nicolas Maury a réagi à la décision d’Adèle Haenel de quitter le milieu du cinéma : « J’aime pas cet état d’être victime parce que pour moi, je pense que je le suis, de fait. Donc du coup, ça m’intéresse pas de le dire. Ce qui m’intéresse vraiment, comme on dit chez Tchekhov, c’est qu’il faut savoir endurer. Je trouve ça beau d’endurer, mais à un moment donné, parfois, on ne peut pas endurer dans un milieu qu’on aime plus. Et si elle n’aime plus le milieu, je pense qu’il y a des raisons pour lesquelles elle en parle, et c’est peut-être des raisons pour lesquelles aussi moi je l’aime pas parfois, je l’adore et je ne l’aime pas. […] Elle se fait dégommer par les haters, comme Blanche Gardin qui a osé, je trouve, dire des choses. Moi, je salue ces femmes. Elles font avancer vraiment les choses, les artistes et l’art. »
🎧 Pour en savoir plus, écoutez l’émission…
53 min 

La Queer Palm ne figure pas parmi les récompenses remises officiellement durant le festival. Depuis 2010, ce trophée récompense un film pour son traitement des thématiques LGBTQIA+ parmi ceux présentés dans toutes les sélections confondues.

Est-ce que cette Queer Palm est une bonne idée ? Un coup de projecteur salvateur sur des thématiques et des personnages encore trop peu représentés à l’écran en 2023 ? Ou est-ce que, comme le pense par exemple Xavier Dolan, ce n’est pas contre-productif de distinguer, de mettre comme ça à part un prix LGBTQIA+ ?

Avec Nicolas Maury, acteur, connu du grand public grâce au rôle d’Hervé dans la série Dix pour Cent ; réalisateur, son premier film est sorti il y a trois ans, Garçon Chiffon ; et chanteur, son premier album sorti chez Warner s’appelle La Porcelaine de Limoges. Il a été président du jury de cette Queer Palm à Cannes en 2021.

Qu’est-ce que la Queer Palm ?

En 2010, c’est un journaliste Franck Finance-Madureira, qui a inventé la Queer Palm. C’est donc une récompense remise lors du Festival de Cannes hors du reste du palmarès. Mais cette Queer Palm n’est pas totalement décorrélée de la sélection puisque le film qui la recevra fait partie des films choisis par le festival.

En Allemagne, le Teddy Award, l’équivalent de la Queer Palm pour le Festival de Berlin, est intégré au palmarès. En 1987, le premier film à l’avoir reçu, c’est La Loi du désir de Pedro Almodovar, qui n’était pas encore connu. À Cannes, la toute première Queer Palm a été donnée à Kaboom, du réalisateur Gregg Araki. L’an dernier, c’est Joyland, de Saim Sadiq, qui a été récompensée. Cette année, c’est le cinéaste américain John Cameron Mitchell à qui reviendra cette tâche.

Une question de regard

La Queer Palm, c’est un prix comme récompensant des films qui disent quelque chose d’intéressant sur la communauté LGBTQIA+. Nicolas Maury explique ce que, pour lui, queer signifie : « Ce serait comme un pays qui contiendrait quand même une chose liquide et libre sur l’identité, sur les questions de genre ou les réponses aussi.« 

Pour lui, c’est plus largement un mouvement artistique libérateur, comme il l’explique : « Il y a des conservatismes dans certaines sélections aussi je trouve. Il n’y a pas un renouvellement forcément des gens qui sont à la tête de certaines sélections. Il faut savoir que tous les festivals internationaux, ils changent en gros tous les quatre ou cinq ans, ce qui est normal. Donc pour moi, queer, c’est aussi inviter à sa table des gens qui normalement ne le sont pas. »

Il revient aussi sur le moment où une des membres du jury de la Queer Palm, en 2011, n’avait pas pu monter les marches de Cannes, car elle portait une combinaison très classe, et des grosses chaussures : « C’est quand même un festival d’art. On peut aussi se calmer sur le côté cannois brushing, satin et puis nœud pap. Enfin, c’est bien, mais c’est aussi à renouveler. Et ça, c’est aussi parfois dans les films eux-mêmes. C’est pour ça que la Queer Palm, c’est toujours un contre-pouvoir aussi. C’est intéressant comme contre-pouvoir. Alors après, s’il devient un jour le pouvoir, c’est chiant peut-être, mais en tant que contre-pouvoir, je trouve ça bien que ça existe. »

C’est une question de regard et non de sujet comme l’explique Nicolas Maury, à propos de la Palme de 2013, La Vie d’Adèle, d’Abdellatif Kechiche : « C’est un immense cinéaste avec qui je rêve un jour peut-être de travailler. Mais je n’ai pas aimé ce film. Je n’aime pas le regard de ce film. Justement, ce n’est pas un regard queer. Et pour vous donner un exemple, de quelqu’un dont l’orientation serait plutôt hétérosexuelle, mais je ne sais pas, c’est Jacques Audiard, avec Les Olympiades. Pour moi, c’est un film queer par exemple, et c’était le premier film d’Audiard que j’ai trouvé queer. C’est un film qui m’a beaucoup étonné parce qu’on n’attendait pas un film comme ça d’Audiard. Il a fait un film très libre, très fluide, très gender fluid. »

Les personnages queer dans la fiction, encore à la marge ?

Pour Nicolas Maury, aujourd’hui, on veut remplir toutes les cases : « Il faut qu’il y ait une personne trans, qu’il y ait un personnage rebeu. Il faut qu’il y ait vraiment toutes les cases, même pour le CNC, alors que je trouve qu’on a oublié une chose, c’est qu’un cinéaste, normalement, dans une salle de cinéma, c’est quelqu’un qui domine notre regard. Moi, par exemple, comme spectateur […] j’ai besoin d’être soumis à un regard. Et pour moi, c’est vraiment ça aussi que récompense la Queer Palm, c’est cette signature-là d’un cinéaste*. »*

Pour lui, les personnages queer sont souvent relégués en arrière-plan mais cela est en train de changer : « Je pense que ça tend à changer avec des premiers films absolument majeurs de ces dernières années, avec des cinéastes comme Yann Gonzalez, comme Mikael Buch, ou encore comme Céline Sciamma qui, quand même ouvrent les portes à tout ça. »

Le milieu du cinéma

En fin d’émission, Nicolas Maury a réagi à la décision d’Adèle Haenel de quitter le milieu du cinéma : « J’aime pas cet état d’être victime parce que pour moi, je pense que je le suis, de fait. Donc du coup, ça m’intéresse pas de le dire. Ce qui m’intéresse vraiment, comme on dit chez Tchekhov, c’est qu’il faut savoir endurer. Je trouve ça beau d’endurer, mais à un moment donné, parfois, on ne peut pas endurer dans un milieu qu’on aime plus. Et si elle n’aime plus le milieu, je pense qu’il y a des raisons pour lesquelles elle en parle, et c’est peut-être des raisons pour lesquelles aussi moi je l’aime pas parfois, je l’adore et je ne l’aime pas. […] Elle se fait dégommer par les haters, comme Blanche Gardin qui a osé, je trouve, dire des choses. Moi, je salue ces femmes. Elles font avancer vraiment les choses, les artistes et l’art. »

🎧 Pour en savoir plus, écoutez l’émission…

53 min

 

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