Linn Marie Tonstad : « La théologie queer naît à partir des histoires de personnes stigmatisées pour des motifs sexuels et genrés »

Linn Marie Tonstad : « La théologie queer naît à partir des histoires de personnes stigmatisées pour des motifs sexuels et genrés »

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Linn Marie Tonstad : « La théologie queer naît à partir des histoires de personnes stigmatisées pour des motifs sexuels et genrés »

Read More  Théologienne américaine protestante, Linn Marie Tonstad est professeure de théologie systématique à l’université Yale. Dans Théologie queer (Labor et Fides, 266 pages, 19 euros), son premier ouvrage traduit en français, elle fait découvrir au lecteur francophone une galaxie de penseurs qui ambitionnent de bousculer les interprétations traditionnelles du message chrétien. Comment définiriez-vous la théologie queer ? Il s’agit d’une théologie liée à l’expérience des personnes dites « queer ». Cela peut avoir différentes significations mais, selon moi, il y a trois éléments particulièrement importants. Premièrement, la théologie queer émerge des histoires, des écrits et des expériences de personnes qui ont été et sont stigmatisées pour des motifs sexuels et genrés mais qui ont su inventer de nouvelles visions du monde. Deuxièmement, la théologie queer prend la sexualité au sérieux, non seulement en tant qu’élément de l’expérience humaine, mais aussi en tant que source d’inspiration pour la pensée et en tant qu’objet de peur et de tensions. Troisièmement, la théologie queer analyse plus globalement comment les ordres sociaux dominants réagissent face à ce qui semble les menacer. Lire aussi la tribune : Article réservé à nos abonnés « Les jeunes trans existent, il est temps de reconnaître leurs droits et de répondre à leurs besoins » Je sais que tout le monde n’est pas à l’aise avec le terme « queer », qui englobe, ou non, différentes réalités en fonction de celles et ceux qui l’emploient. Certaines personnes préfèrent utiliser des termes plus précis tels que « gay », « lesbienne » ou « trans », par exemple. Mais personnellement, je plaide pour un vocabulaire étendu et flexible. YANN LEGENDRE Quels sont les profils des théologiens queers ? Il y a plusieurs catégories. Certains écrivent simplement des textes sur la sexualité et la spiritualité. D’autres se préoccupent, par exemple, de démontrer la compatibilité du christianisme avec l’homosexualité, comme dans le cas de ceux que l’on qualifie d’« apologistes queer ». Lire aussi la critique : Article réservé à nos abonnés « Dysphoria Mundi » : le monde est en transition Leurs arguments se concentrent sur la question de savoir si le type de rapports sexuels qui semble être condamné dans des passages bibliques, comme ceux du Lévitique (« Tu ne coucheras point avec un homme comme on couche avec une femme. C’est une abomination » Lévitique, XVIII, 22) ou plusieurs passages des Epîtres de Paul, est équivalent aux types de rapports sexuels et amoureux que l’on trouve entre homosexuels aujourd’hui. Dans l’Antiquité, les relations homosexuelles se pratiquaient souvent dans des contextes bien particuliers (prostitution, rites de passage, viols…) et les Anciens ne pouvaient pas en avoir la même perception que nous. En outre, ces interdits bibliques ont été formulés à une époque où les normes liées à la pureté rituelle étaient centrales. Après tout, questionnent les apologistes queers, pourquoi certains interdits alimentaires ou vestimentaires que l’on trouve dans la Bible ont-ils été abandonnés par la suite, mais pas ceux liés à la sexualité ? Il vous reste 43.01% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés. 

Théologienne américaine protestante, Linn Marie Tonstad est professeure de théologie systématique à l’université Yale. Dans Théologie queer (Labor et Fides, 266 pages, 19 euros), son premier ouvrage traduit en français, elle fait découvrir au lecteur francophone une galaxie de penseurs qui ambitionnent de bousculer les interprétations traditionnelles du message chrétien.

Comment définiriez-vous la théologie queer ?

Il s’agit d’une théologie liée à l’expérience des personnes dites « queer ». Cela peut avoir différentes significations mais, selon moi, il y a trois éléments particulièrement importants. Premièrement, la théologie queer émerge des histoires, des écrits et des expériences de personnes qui ont été et sont stigmatisées pour des motifs sexuels et genrés mais qui ont su inventer de nouvelles visions du monde.

Deuxièmement, la théologie queer prend la sexualité au sérieux, non seulement en tant qu’élément de l’expérience humaine, mais aussi en tant que source d’inspiration pour la pensée et en tant qu’objet de peur et de tensions. Troisièmement, la théologie queer analyse plus globalement comment les ordres sociaux dominants réagissent face à ce qui semble les menacer.

Lire aussi la tribune : Article réservé à nos abonnés « Les jeunes trans existent, il est temps de reconnaître leurs droits et de répondre à leurs besoins »

Je sais que tout le monde n’est pas à l’aise avec le terme « queer », qui englobe, ou non, différentes réalités en fonction de celles et ceux qui l’emploient. Certaines personnes préfèrent utiliser des termes plus précis tels que « gay », « lesbienne » ou « trans », par exemple. Mais personnellement, je plaide pour un vocabulaire étendu et flexible.

YANN LEGENDRE

Quels sont les profils des théologiens queers ?

Il y a plusieurs catégories. Certains écrivent simplement des textes sur la sexualité et la spiritualité. D’autres se préoccupent, par exemple, de démontrer la compatibilité du christianisme avec l’homosexualité, comme dans le cas de ceux que l’on qualifie d’« apologistes queer ».

Lire aussi la critique : Article réservé à nos abonnés « Dysphoria Mundi » : le monde est en transition

Leurs arguments se concentrent sur la question de savoir si le type de rapports sexuels qui semble être condamné dans des passages bibliques, comme ceux du Lévitique (« Tu ne coucheras point avec un homme comme on couche avec une femme. C’est une abomination » Lévitique, XVIII, 22) ou plusieurs passages des Epîtres de Paul, est équivalent aux types de rapports sexuels et amoureux que l’on trouve entre homosexuels aujourd’hui.

Dans l’Antiquité, les relations homosexuelles se pratiquaient souvent dans des contextes bien particuliers (prostitution, rites de passage, viols…) et les Anciens ne pouvaient pas en avoir la même perception que nous. En outre, ces interdits bibliques ont été formulés à une époque où les normes liées à la pureté rituelle étaient centrales. Après tout, questionnent les apologistes queers, pourquoi certains interdits alimentaires ou vestimentaires que l’on trouve dans la Bible ont-ils été abandonnés par la suite, mais pas ceux liés à la sexualité ?

Il vous reste 43.01% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

 

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    Soutien à notre collègue Bergeaud-Blackler

    Florence Bergeaud-Blackler, chercheuse au CNRS, devait donner une conférence à l’Université de Lille sur un sujet brûlant : l’influence des Frères musulmans et l’entrisme islamiste dans certains syndicats et mouvements de gauche. Pourtant, sa conférence a été annulée. Cette décision, prise par le doyen, est un acte politique qui ne dit pas son nom. Une fois de plus, l’université cède aux pressions idéologiques et sacrifie le débat scientifique sur l’autel du conformisme militant.
     
    Cette annulation n’est pas un cas isolé. Elle s’inscrit dans un climat où toute critique de l’islamisme est immédiatement disqualifiée, où ceux qui osent poser des questions sont taxés de “racistes” ou d’“extrême droite”. Dans les sciences sociales, en particulier, la règle tacite est claire : on se soumet ou on dégage. Ceux qui refusent de plier sont mis à l’écart, leurs conférences interdites, leurs noms jetés en pâture à des étudiants dressés à confondre débat intellectuel et offense personnelle.
     
    Comment expliquer que des syndicats, censés défendre la liberté d’expression, se soient transformés en gardiens du dogme ? Pourquoi tant de collègues se taisent, sinon par peur ? Cette lâcheté collective est précisément ce qui permet aux censeurs d’imposer leur loi. Mais il faut le dire : l’Université ne peut pas devenir un espace clos où seuls certains discours sont autorisés.
     
    Face à cette censure, la chercheuse a décidé de maintenir sa conférence, ailleurs s’il le faut. Le débat aura lieu le 5 mars, avec le plus grand nombre possible de participants. Car la lutte contre l’islamisme et ses complicités idéologiques n’est pas une affaire de partis : c’est une question existentielle pour notre démocratie.
    L’Université doit rester un lieu de savoir et d’échange, pas un bastion du sectarisme.