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On muselle le conseil des sages de la laïcité

La mise sous tutelle autoritaire du Conseil des Sages de la Laïcité par le Ministre Pap N’Diaye est conforme aux grands principes qui régissent depuis quelques décennies le Ministère de l’Éducation nationale: caporalisation des professeurs, conformisme idéologique à la doxa pédagogiste et anti-intellectualisme militant. On eut pû attendre de la part d’un intellectuel présenté comme libéral le respect des principes de la libre expression quant à la défense des principes fondateurs de la République française, y compris à l’intérieur de son Ministère. C’eût été oublier qu’après une formation universitaire brillante dans sa jeunesse, M. Ndiaye a été pris en main par la pensée universitaire américaine qui l’a rendu ce qu’il est devenu. Cette seconde naissance intellectuelle l’a fait regarder son pays et ses traditions intellectuelles et politiques avec défiance, comme il l’a publiquement affirmé aux Etats-Unis devant un public conquis.

La grande dérive de l’Éducation nationale a produit en cinquante ans l’effondrement intellectuel du système éducatif français, et son incapacité à transmettre les savoirs pour lesquels il a été édifié ; le classement PISA dans lequel l’Éducation nationale française est désormais mondialement reléguée et ridiculisée tous des deux ans ne provoque aucune réaction de nos dirigeants pourtant si bavards. Quant à sa grande dérive morale, elle a conduit il y a deux ans à la décapitation en pleine rue de notre collègue Samuel Paty -dont tout a été fait pour taire le préjugé antisémite féroce que ses assassins attachent au prénom Samuel. Le buste de « Samuel Paty » est rangé dans le dépôt du collège faute de pouvoir être installé dans l’entrée où dans la cour du collège, puisque notre État est si impuissant qu’il n’a ni l’ambition ni l’autorité d’imposer sa présence dans cet établissement martyre. Il est vrai que l’islam rigoriste interdit la figuration humaine.  Cet évènement sans retour n’a pourtant été qu’une pierre douloureuse sur le chemin qui a conduit à l’éradication des élèves juifs des établissements publics français, tout au moins dans les métropoles, une fois que leur vie y a été rendue impossible ou dangereuse, et qui conduit encore tous les jours les professeurs et les principaux et proviseurs à batailler pour appliquer les règlement qui contreviennent aux exigences de l’islam radicalisé (du fleurissement des abayas dont on apprend qu’un lycée de Vénissieux en compte deux centaines, à l’interdiction des petite filles musulmanes d’apprendre à nager ; elles pourraient y prendre plaisir).

Fort de ce contexte, notre ministre, au lieu de travailler ardemment à redresser la barre d’un bateau à la dérive – comme en réhaussant le niveau tragiquement effondré des mathématiques, qui impose aux professeurs de mathématiques de noter tous les élèves de la « spécialité math » au-dessus de 15/20, comme on le faisait y a 30 ans dans les cours de latin avant leur disparition, afin de séduire les derniers candidats-, s’attaque au Conseil des Sages de la Laïcité, une des très rares institutions françaises ayant l’autorité morale et politique de faire entendre sa voix sur une question capitale. Mais nos technocrates n’aiment ni la liberté, ni nos principes républicains, ni l’indépendance d’esprit, ni la critique implicite de leur inaction.

Il a donc été décidé de faire taire ce Conseil créé par Jean-Michel Blanquer, y compris son éminente Présidente, Dominique Schnapper, comme si ce Conseil appartenait au Ministère des Armées ou au Ministère de l’Intérieur. La caporalisation de ce Conseil désormais tenu de se taire et de répondre aux seules questions adressées par le Ministre, est une fermeture à peine voilée. La nomination de nouveaux membres, au sujet desquels on préfèrera ne pas s’interroger sur les raisons de leur présence ni sur les motivations idéologiques qui y ont présidé, est un rideau de fumée.

Cette dégradation de l’outil de vigilance et d’observation des dérives en cours dans le système éducatif, sous la pression d’un fondamentalisme islamique déculpabilisé et agressif, oblige plus encore notre Observatoire dans son rôle de vigie des principes fondamentaux de la République dans les domaines qui nous intéressent: l’école, la liberté d’expression et de pensée, l’enseignement supérieur et la recherche, le respect du pluralisme, la promotion par le mérite et par les concours, la lutte contre les obscurantismes antiscientifiques, l’inculture historique et religieuse, la destruction de la langue française comme vecteur numéro un de la citoyenneté dans ce pays, etc.

Le travail de sape du Ministère nous oblige. Notre observatoire et le LAIC seront heureux d’accueillir tous ceux qui se sentent investis par ces ardents impératifs.

Pierre Vermeren

Pierre Vermeren

Pierre Vermeren, normalien et agrégé d'histoire, est un spécialiste du Maghreb et des mondes arabo-berbères.