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Un an après le colloque: que reconstruire ?

Un an après le colloque: que reconstruire ?

Nathalie Heinich

Chercheuse, sociologue

[par Nathalie Heinich]

Le 10 janvier – soit un an presque jour pour jour après notre colloque de la Sorbonne, dont les actes sont sur le point de paraître – s’est tenu à l’université Ben-Gurion du Negev à Beer-Sheva, en Israël, le colloque Perils for Science, organisé à l’initiative de l’historienne des sciences Ute Deichmann par le « Jacques Loeb Center for the History and Philosophy of Life Sciences ». Il s’agissait de rassembler sur une journée divers témoignages et réflexions sur les méfaits du wokisme dans le monde académique – et l’on apprenait justement ce jour-là qu’une historienne de l’art venait d’être sanctionnée par son université du Minnesota pour avoir montré à ses étudiants une miniature persane figurant Mahomet… Les intervenants étaient venus des États-Unis, d’Allemagne et de France, et ont fait entendre (avec un bel échantillonnage d’accents : hongrois, roumain, ukrainien, arabe, israélien, français…) la voix de plusieurs disciplines – mathématiques, biologie, physique, chimie, psychologie, sociologie, épistémologie. Le résultat – dont on espère qu’il pourra être publié – est à la fois totalement déprimant et, quand même, assez revigorant. Déprimant, parce que l’accumulation d’exemples de dingueries « DE » (« Diversity and Equity ») donne le sentiment que le monde universitaire est brutalement devenu un asile de fous, où les revues scientifiques les plus réputées soumettent la publication à des critères n’ayant plus rien à voir avec la science. Et revigorant malgré tout, parce que l’énergie et l’inventivité investies dans la résistance à ce tsunami de délires bien intentionnés permettent d’espérer qu’il doit bien y avoir un moyen de sortir de l’asile, même si ce n’est pas pour tout de suite. Défense et illustration de la notion de vérité depuis la production jusqu’à la diffusion grand public des connaissances, refus de voir le combat pour la science réduit à une cause droitière, encouragement au boycott des revues affichant des critères moraux, production de lettres-types à envoyer aux responsables de départements où sévissent des formations ne répondant pas aux critères de scientificité, incitation à investir les conseils universitaires : il y a moyen, malgré tout, de ne pas nous laisser enfermer dans la camisole. Et nous sommes nombreux à nous débattre : il faut le savoir, et le faire savoir, comme nous nous y employons dans notre Observatoire.

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