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«Woke de toutes les agences, unissez-vous !», Nicolas Gandrillon (LGM&co)

Collectif

Tribune des observateurs

Read More  « Suppôt du capitalisme », « Cheval de Troie de l’économie libérale », « figure dissimulée du patriarcat »… La publicité, depuis sa création, ne cesse d’être, logiquement, attaquée pour ce qu’elle est : une tentative permanente d’influence de la part de marques commerciales à des fins commerciales. Un métier où le scrupule n’existe pas, où l’on manipule avec cynisme et démagogie, sans jamais se préoccuper de son impact sociétal profond.Et de fait, il est indéniable que la publicité a, pendant les Trente Glorieuses et bien au-delà, largement participé à ancrer dans le cerveau des Français des stéréotypes consternants : la femme de moins de 25 ans est un objet du désir d’1,80m, la femme de plus de 30 ans est à la cuisine et avec les enfants, l’homme est blanc, viril, hétérosexuel, il ramène l’argent et prend les vraies décisions, les minorités visibles ne le sont pas, les personnes âgées sont des grand-mères bien coiffées qui préparent de bons goûters… Bref, la société d’hier, masculiniste, genrée, ethnocentrée, normée, excluante.Coincés sous ChiracOr si la publicité a le pouvoir de conforter les stéréotypes, elle a celui, plus incroyable encore, de les retourner un à un, de fracasser le château de cartes de l’ancien monde, d’être l’avant-garde des nouvelles valeurs d’ouverture, de non-jugement, de refus des normes. C’est bien précisément ce qui se passe chez nos voisins publicitaires anglais, américains, sans parler des scandinaves ou des coréens, chacun à sa façon, chacun avec sa culture. Dans ces pays, la publicité est le « bélier woke » qui bouscule la société patriarcale, qui ose dénoncer l’ancien monde. Mieux, qui défonce ses idées reçues. Quant à nous, publicitaires français, nous sommes restés coincés sous Chirac, Johnny et Sardou. La honte.Avec toujours une menace sourde, un gros mot qui flotte dans l’air, agité comme un épouvantail, avec son cortège de concepts zombies, entre féminazies, islamo-gauchistes, écoterroristes, et barbecues masculinistes, le nouveau spectre des publicitaires français : le mot « woke », prononcé à voix basse, et jamais devant le client, faut pas déconner. Pour preuve, le tombereau de commentaires haineux que nous avons reçus chez LGM&co pour avoir osé imaginer un film sous forme d’ode à la diversité de la société française pour les fruits et légumes frais.Alors comment expliquer cette bizarrerie française ? Notre esprit finalement plus latin qu’anglo-saxon, notre rapport à la politique souvent peu décomplexé, notre fond de sauce judéo-chrétienne ? Ou alors plus trivialement une forme de couardise bien franchouillarde, qui ne rappelle pas les heures les plus glorieuses de la France ? Il est vrai que nos débats franco-français infinis et tortueux sur la laïcité, le voile, ou encore l’écriture inclusive en disent long sur notre paresse à changer, notre confort à nous conforter.La conscience de l’empreinteMais là, je vous parle des Français, pas des publicitaires français… Eux sont forcément ouverts, branchés, modernes, de toutes les couleurs et de tous les genres, ils sont nés ou presque avec MeToo… Alors pourquoi une telle frilosité ? Peut-être parce que leur patron est le premier ringard (à Rolex) de France ? Ou peut-être parce que le patron de leur patron est le plus grand réactionnaire de France, le Dark Vador anti-woke ? Ou par lâcheté et auto-censure ?Mais comme 2023 n’est pas 1984, il est fini le temps du cynisme à la Mad Men où seule comptait la vente. Nous avons, nous, publicitaires de 2023, la conscience de l’empreinte que nous laissons, et nous ne pouvons être en retard sur notre temps, ou pire, nous réfugier dans ses derniers replis rances. Alors, chers jeunes et moins jeunes publicitaires engagés et éveillés, si votre patron n’est pas le bon, changez-en ! Et si le nouveau ne vaut pas mieux, devenez le vôtre. Pour que woke ne soit plus un gros mot ! 

« Suppôt du capitalisme », « Cheval de Troie de l’économie libérale », « figure dissimulée du patriarcat »… La publicité, depuis sa création, ne cesse d’être, logiquement, attaquée pour ce qu’elle est : une tentative permanente d’influence de la part de marques commerciales à des fins commerciales. Un métier où le scrupule n’existe pas, où l’on manipule avec cynisme et démagogie, sans jamais se préoccuper de son impact sociétal profond.

Et de fait, il est indéniable que la publicité a, pendant les Trente Glorieuses et bien au-delà, largement participé à ancrer dans le cerveau des Français des stéréotypes consternants : la femme de moins de 25 ans est un objet du désir d’1,80m, la femme de plus de 30 ans est à la cuisine et avec les enfants, l’homme est blanc, viril, hétérosexuel, il ramène l’argent et prend les vraies décisions, les minorités visibles ne le sont pas, les personnes âgées sont des grand-mères bien coiffées qui préparent de bons goûters… Bref, la société d’hier, masculiniste, genrée, ethnocentrée, normée, excluante.

Coincés sous Chirac

Or si la publicité a le pouvoir de conforter les stéréotypes, elle a celui, plus incroyable encore, de les retourner un à un, de fracasser le château de cartes de l’ancien monde, d’être l’avant-garde des nouvelles valeurs d’ouverture, de non-jugement, de refus des normes. C’est bien précisément ce qui se passe chez nos voisins publicitaires anglais, américains, sans parler des scandinaves ou des coréens, chacun à sa façon, chacun avec sa culture. Dans ces pays, la publicité est le « bélier woke » qui bouscule la société patriarcale, qui ose dénoncer l’ancien monde. Mieux, qui défonce ses idées reçues. Quant à nous, publicitaires français, nous sommes restés coincés sous Chirac, Johnny et Sardou. La honte.

Avec toujours une menace sourde, un gros mot qui flotte dans l’air, agité comme un épouvantail, avec son cortège de concepts zombies, entre féminazies, islamo-gauchistes, écoterroristes, et barbecues masculinistes, le nouveau spectre des publicitaires français : le mot « woke », prononcé à voix basse, et jamais devant le client, faut pas déconner. Pour preuve, le tombereau de commentaires haineux que nous avons reçus chez LGM&co pour avoir osé imaginer un film sous forme d’ode à la diversité de la société française pour les fruits et légumes frais.

Alors comment expliquer cette bizarrerie française ? Notre esprit finalement plus latin qu’anglo-saxon, notre rapport à la politique souvent peu décomplexé, notre fond de sauce judéo-chrétienne ? Ou alors plus trivialement une forme de couardise bien franchouillarde, qui ne rappelle pas les heures les plus glorieuses de la France ? Il est vrai que nos débats franco-français infinis et tortueux sur la laïcité, le voile, ou encore l’écriture inclusive en disent long sur notre paresse à changer, notre confort à nous conforter.

La conscience de l’empreinte

Mais là, je vous parle des Français, pas des publicitaires français… Eux sont forcément ouverts, branchés, modernes, de toutes les couleurs et de tous les genres, ils sont nés ou presque avec MeToo… Alors pourquoi une telle frilosité ? Peut-être parce que leur patron est le premier ringard (à Rolex) de France ? Ou peut-être parce que le patron de leur patron est le plus grand réactionnaire de France, le Dark Vador anti-woke ? Ou par lâcheté et auto-censure ?

Mais comme 2023 n’est pas 1984, il est fini le temps du cynisme à la Mad Men où seule comptait la vente. Nous avons, nous, publicitaires de 2023, la conscience de l’empreinte que nous laissons, et nous ne pouvons être en retard sur notre temps, ou pire, nous réfugier dans ses derniers replis rances. Alors, chers jeunes et moins jeunes publicitaires engagés et éveillés, si votre patron n’est pas le bon, changez-en ! Et si le nouveau ne vaut pas mieux, devenez le vôtre. Pour que woke ne soit plus un gros mot !

 

« Ce post est un relevé d’information de notre veille d’information »

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