[par Cyrille Godonou, statisticien]
En lisant l’ouvrage L’évaluation, une menace ? co-écrit par le trio Céline Darnon, Céline Buchs et Fabrizio Butera, on découvre le passage qui suit :
« Il va de soi que choisir de s’orienter dans une filière plutôt qu’une autre dépend, notamment, de la confiance que l’on peut avoir d’y réussir, et donc de l’évaluation que l’on fait de son propre niveau de compétence (auto-évaluation). Ce lien entre attente de réussite et choix d’orientation a été clairement démontré dans la littérature scientifique. De même, le sentiment de réussite que développent les élèves, filles comme garçons, vis-à-vis des mathématiques, est très largement influencé par le stéréotype de genre dans ce domaine. Il s’avère notamment que le stéréotype de genre en mathématiques conduit parents et enseignants à évaluer différemment les compétences des deux sexes. D’où l’idée d’un biais ancré dans les stéréotypes de genre.
(Darnon, Buchs, & Butera, 2015)..
Plusieurs études montrent que les parents perçoivent les filles comme moins douées en mathématiques, moins intéressées par cette discipline, et par conséquent plus contraintes de travailler pour réussir. Peut-être plus important encore : ces perceptions persistent y compris lorsque les filles obtiennent des notes identiques voire supérieures à celles des garçons ! Jussim et Eccles ont quant à eux interrogé une centaine d’enseignants de mathématiques à propos de la compétence et des efforts déployés dans cette discipline par chacun des élèves de leur classe de 6e (11-12 ans).
En dépit de toute différence (dans cette étude) entre filles et garçons s’agissant des notes et du temps consacré aux devoirs de mathématiques, les enseignants jugeaient les garçons plus compétents et moins laborieux que les filles en mathématiques. On peut concevoir que les enseignants puissent se tromper sur le temps que les élèves consacrent à leurs devoirs. Il est a priori plus difficile de comprendre pourquoi ils surestiment la compétence des garçons dont ils connaissent pourtant précisément les notes.
D’où l’idée d’un biais ancré dans les stéréotypes de genre. » (Darnon, Buchs, & Butera, 2015).
A première vue, il semble en effet choquant que des enseignants qui notent leurs élèves et donc connaissent les notes qu’ils donnent, jugent différemment des élèves ayant pourtant obtenu les mêmes notes en classe : un examen de prime abord ne peut qu’amener à conclure à des stéréotypes de genre au détriment des filles perçues, a priori, à tort comme étant moins performantes. Dans l’article Les filles et les garçons face aux sciences. Les enseignements d’une enquête dans les lycées franciliens, Breda et al. (2018) font un raisonnement similaire, en utilisant comme étalon les notes obtenues au diplôme national du brevet (DNB) pour estimer le niveau réel en mathématiques des filles et des garçons dans l’enseignement secondaire afin de les confronter aux choix d’orientation (Breda, Grenet, Monnet, & Van Effenterre, 2018). Les résultats des filles et des garçons franciliens scolarisés en classe de seconde ou de terminale scientifique, à l’épreuve de mathématiques du diplôme national du brevet des collèges, y apparaissent extrêmement proches (Figure 1). Et pourtant « les filles déclarent nettement moins souvent avoir un bon niveau en mathématiques que les garçons (entre 11 et 14 points d’écart) » (Breda, Grenet, Monnet, & Van Effenterre, 2018).
On retrouve une proximité des résultats des filles et des garçons au niveau international.
Dans certains pays, les filles obtiennent un meilleur score que les garçons en mathématiques.
Mais, pour en revenir à l’ouvrage précité (Darnon, Buchs, & Butera, 2015), cette conclusion aboutissant à l’idée que parents et enseignants seraient fortement biaisés (et les filles elles-mêmes), sans fondement empirique, quant aux écarts de performance en mathématiques à notes pourtant égales, est-elle robuste ?
Comme nous allons le voir, un examen attentif de la littérature semble indiquer qu’il y a quelques nuances importantes à apporter. D’une part, au niveau individuel, il est tout à fait possible d’observer des différences de performance sexuées en situation de compétition en faveur des garçons, alors qu’aux examens, les filles obtiennent des résultats équivalents voire supérieurs (Ors, Palomino, & Peyrache, 2013). D’autre part, au niveau des regroupements par sexe, même à moyenne équivalente, la variance des garçons est éventuellement plus grande, d’où leur possible surreprésentation parmi les plus performants et parmi les moins performants (Halpern, et al., 2007). Ces deux mécanismes hautement contre-intuitifs expliquent l’illusion subséquente à une approche consistant à simplement considérer que deux élèves qui ont les mêmes notes en classe obtiendraient les mêmes résultats en concours ou que deux groupes sociodémographiques obtenant des moyennes similaires seraient censés parvenir aux mêmes performances lors d’épreuves sélectives.
D’ailleurs, certains promoteurs de quotas1et de la parité n’hésitent à suggérer de modifier les coefficients des concours destinés à des carrières de mathématiciens ou physiciens (écoles normales supérieures) : « Ainsi le concours C/S ne prend en compte que les notes de mathématiques et de physique pour éliminer les candidats à l’écrit. Il est exactement dessiné pour sélectionner des génies, des médailles Fields — et d’ailleurs ça fonctionne bien ainsi ! Cette option désavantage particulièrement les filles, qui ont plutôt tendance à être bonnes en tout, comme on le voit sur les résultats de celles qui sont admises à l’oral. Si l’on veut bien reconnaître que « le temple de la science » n’est pas constitué uniquement de plantes grimpantes, les femmes, avec leurs talents particuliers, ceux de la communication par exemple, peuvent apporter une contribution très importante. » (Leduc, 1995). Ces propos contrastent avec ceux de Darnon et al. (2015).
Des notes identiques en classe ou en examen ne signifient pas nécessairement que les performances soient identiques en situation de compétition ou de tests standardisés
En premier lieu, le fait d’avoir des notes similaires n’implique pas forcément l’obtention de résultats équivalents en contexte de compétition ou même de tests standardisés à caractère inhabituel.
Aux Etats-Unis, l’avantage masculin au test SAT (Scholastic Assessment Test) en mathématiques perdure depuis une cinquantaine d’années (Perry M. J., 2016).
Au sein du top 1% des meilleurs performeurs en mathématiques au test SAT aux Etats-Unis il y a quasiment deux fois plus de garçons que de filles chaque année entre 2011 et 2015.
En France, au collège, apparaît une asymétrie sexuée selon qu’on considère des évaluations proprement scolaires en contrôle continu ou des tests portant sur un contenu évaluatif dont les élèves ne sont pas familiers : « Les tests cognitifs sont globalement plus favorables aux garçons que les évaluations qui se fondent sur des apprentissages scolaires en mathématiques mais également en français. Cet effet peut s’expliquer en partie par le contenu des évaluations. La plus forte implication des filles dans les apprentissages leur permet de mieux réussir les épreuves du DNB. Cependant, les filles sont moins avantagées à l’épreuve terminale du DNB de mathématiques qui les place dans une situation moins connue que celle des devoirs réalisés en classe avec leur enseignant lors du contrôle continu. Au contraire, leur maîtrise des apprentissages scolaires ne les prépare pas autant aux tests cognitifs dont les exercices et les questions sont moins habituels. » (Chabanon & Jouvenceau, 2022 ). Ce constat n’est pas nouveau2(Duru-Bellat, 1995).
Le moindre accès des femmes aux établissements d’élites aux États-Unis serait ainsi dû au différentiel de performance aux tests d’entrée (tests SAT s’apparentant à un concours) et non à la discrimination en tant que telle (Bielby, Posselt, Jaquette, & Bastedo, 2014), les auteurs suggérant d’en modifier les épreuves puisque les femmes réussissent bien en amont (au lycée) et en aval (une fois dans les universités), les tests seraient donc mal calibrés selon eux. Il convient de mentionner que des résultats similaires ont été mis en évidence pour les élèves de la grande école de commerce française HEC où là aussi les filles réussissent mieux que les garçons au baccalauréat et en première année d’école alors que c’est l’inverse au concours d’entrée (Ors, Palomino, & Peyrache, 2013).
En Espagne également, les compétitions de mathématiques auxquelles participent 40 000 élèves entre 10 et 16 ans montrent que la part de filles diminue, étant de 44% à la première étape des éliminatoires mais plus que de 34% à la seconde étape plus concurrentielle (plus que 2 800 élèves), sachant que parmi les 146 meilleurs, les filles ne représentent plus que 13% (Iriberri & Rey-Biel, 2017) alors que les filles participantes obtiennent un niveau moyen légèrement supérieur (l’écart n’étant pas statistiquement significatif), à celui des garçons qui concourent, lors des tests classiques non compétitifs en classe : un véritable « plafond de verre » non imputable à la discrimination est donc constaté par les auteurs.
Deux effets expliquent ce phénomène d’attrition : d’une part la surreprésentation croissante des garçons au fur et à mesure qu’on s’élève dans l’échelle des meilleures performances et d’autre part, à niveau équivalent (contrôlé par les notes aux tests en classe), de moins bonnes réponses des filles à mesure que la difficulté s’élève (comparativement avec les garçons).
Ce différentiel de performance à notes identiques est suffisamment contre-intuitif pour donner lieu à des interprétations erronées. Mais, il a bien été mis en évidence par la littérature, comme l’illustrent les données des Olympiades et du Concours général en mathématiques (cf. ci-dessous).
Même à moyenne égale une variance différente pourrait expliquer la surreprésentation d’un sexe dans l’élite en mathématiques
En second lieu, une variance différente
En second lieu, il est important de bien saisir qu’une même moyenne entre deux groupes peut se conjuguer avec une variance différente. Un exemple fictif caricatural peut l’illustrer. Soient deux groupes A et B, le groupe A étant à moitié composé d’élèves ayant pour note 20/20 et pour l’autre moitié des élèves ayant pour notes 0/20. Le groupe B lui n’est composé que d’élèves ayant tous pour note 10/20. La moyenne des deux groupes est identique, soit 10/20 mais la variance est nulle pour le groupe B alors qu’elle est relativement grande pour le groupe A. Si une sélection élitiste s’opère, seuls des membres du groupe A seront sélectionnés, en dépit d’une moyenne identique pour les deux groupes A et B.
Plus une sélection est drastique, plus il convient de prendre en compte l’élite des deux groupes comme référence de comparaison et non pas l’ensemble des deux groupes. En effet, les individus sélectionnés sont atypiques, soit par leurs compétences, soit par leur motivation, soit par les deux.
Or, il existe bien un phénomène de réduction de la part de filles au fur et à mesure qu’on s’élève dans la hiérarchie des performances en mathématiques, comme l’illustrent les figures 1 et 2 des travaux menés en Espagne (Iriberri & Rey-Biel, Competitive Pressure Widens the Gender Gap in Performance: Evidence from a Two-Stage Competition in Mathematics, 2017). Aux Etats-Unis dans le top 1 pour 10 000 des tests SAT en mathématiques, il y aurait onze fois plus de garçons que de filles (Hoff Sommers, 2009). Dans une revue très détaillée du différentiel sexuée en sciences, on trouve « le ratio homme/femme de 2/1 pour les adolescents d’un score de 500 ou plus en mathématiques au test SAT, 4/1 pour ceux d’un score de 600 ou plus et de 13/1 pour ceux d’un score d’au moins 700 » (Halpern, et al., 2007).
La surreprésentation masculine dans les plus hauts scores se vérifie en France sur la population des collégiens en mathématiques et dans les tests psychométriques, malgré un quotient intellectuel (QI) un peu plus élevé (Flynn, 2012) pour les filles (Guez, Explaining the IQ-Achievement Gap in France: an Epidemiological Analysis using the DEPP Cohort Study, 2017). Mais, le constat qu’à QI non-verbal équivalent les filles obtiennent de moins bons résultats en mathématiques est paradoxal : en effet le QI non-verbal est justement très corrélé aux résultats en mathématiques (Guez, Panaïotis, Peyre, & Ramus, 2018). Aux États-Unis également, on constate que le ratio par sexe en mathématiques pour la population blanche consiste en 1,45 garçon par fille pour le 95ème percentile et 2,06 pour le 99ème, ces chiffres étant respectivement de 1,09 et 0,91 pour la population asiatique très minoritaire (Hyde, Lindberg, Linn, Ellis, & Williams, 2008). Les auteurs constatent ainsi qu’une discipline universitaire exigeant une compétence cognitive avec un plancher au 99ème percentile aurait en principe un ratio par genre d’environ 2, soit 67% d’hommes et 33% de femmes alors qu’en réalité les doctorats en ingénierie ne comprennent que 15% de femmes. Le différentiel de performance en mathématiques dans la queue de la distribution ne suffit donc pas à expliquer la sous-représentation des femmes selon les auteurs mais répond en partie à la question parfois posée : « Mais comment mesurer cette compétence quand elle ne se rend jamais à l’étape de la comparaison ? » (Petrowski, 2018).
Le concours général en mathématiques et en sciences physiques est organisé depuis le 19e siècle permettant d’avoir un certain recul sur les filles primées au cours de deux siècles3, la taille suffisamment de l’échantillon des participants permettant de tirer des conclusions, grâce aux données statistiques sexuées disponibles4 pour les années récentes5.
Le concours général de mathématiques vu par l’enseignant Johan Yebbou (Association
des Professeurs de Mathématiques de l’Enseignement Public)6:
« Palmarès 2005-2014 Quelques observations peuvent être tirées de l’examen des palmarès des dix dernières années.
• Un fort déséquilibre des sexes : les filles obtiennent globalement 10% des prix, accessits, mentions. Ce taux reste valable aussi si on se limite aux prix au sens strict, puisque trois jeunes filles en ont obtenu un depuis 2005 : Suzanne Lanéry, 3e prix en
2005 ; Irène Waldspurger, 2e prix en 2006 ; Diane Gallois-Wong, 1er prix en 2011. ll faut semble-t-il remonter à 1934 pour trouver une autre jeune fille, Jacqueline Ferrand, 1er prix du concours général de mathématiques. »
Le rapport de jury du concours général Physique-chimie 2018 série S de Physique-chimie mentionne :
« On dénombre donc environ 31% de filles parmi les inscrits pour une représentation d’environ 47% dans la population des élèves des classes de terminale S1 » (Obert & Szymczak, 2018).
En 2018, on dénombre 712 filles pour 1589 garçons au concours général de physique-chimie parmi les inscrits, soit 31% de filles7.
Le rapport du jury concours général 2017 pour l’épreuve de Physique-chimie en série S énonce : « On dénombre donc plus de 32% de filles parmi les inscrits (pour une représentation de 47% dans la population des élèves des classes de terminale S). » (Obert & Szymczak, 2018).
Voici ce qu’on peut lire dans le rapport du jury du concours général Mathématiques Série S—Session 2017 : « Le jury a reçu 4311 copies. Seules 18 copies peuvent être primées, selon les règles du concours. Le palmarès compte 3 filles. Toutefois le jury a estimé que 93 autres copies étaient d’une très grande qualité voire d’une qualité remarquable (on compte 10% de filles dans cette liste). » (Torossian, 2017).
« Concernant la participation par académie et pays, voici un tableau plus précis. Le pourcentage de filles est stabilisé depuis plusieurs années à 30%. Le jury encourage les professeurs des classes de Terminale S à inciter les jeunes filles de ces classes à présenter le concours, en toute confiance. » (Torossian, 2017).
Remarquons que les filles constituent 47% des élèves en Terminale Scientifique mais plus que 30% des élèves participant au concours général et in fine plus que 10% des copies « d’une très grande qualité voire d’une qualité remarquable ». Ce « plafond de verre » chez des adolescents n’est guère susceptible de s’expliquer par des charges familiales liées à la maternité.
Voici les résultats des Olympiades de mathématiques en classe de quatrième pour l’académie de Grenoble entre 2014 et 2017 : les filles sont minoritaires parmi les primés (26%) et les classés pour chacune des années (38%).
En 2014, elles constituent un quart des primés et un tiers des classés (Figure 6). En 2015, la part de filles au sein des primées recule pour d’établir à 15% mais celle parmi les classés augmentent, s’élevant à 41% (Figure 7). En 2016, 27% des primés sont des filles et 35% des classés le sont. Entre 2014 et 2016, la part de filles au sein de l’ensemble des classés et des primés est aux alentours de 30%. Une hausse de la part de filles a lieu en 2017 avec 36% des primés qui sont des filles et 44% des classés (Figure 9).
Au total, sur cette période un quart de filles parmi les élèves primés et un tiers parmi l’ensemble des personnes primées ou classées, ce sont des parts qu’on peut rapprocher de la part de femmes dans les écoles d’ingénieurs et dans la recherche en mathématiques et sciences physiques (17% et 18% en 2006)8.
Figure 8 Palmarès par sexe en mathématiques au concours des Olympiades de classe de quatrième en 2016 dans l’académie de Grenoble
Figure 9 Palmarès par sexe en mathématiques au concours des Olympiades de classe de quatrième en 2017 dans l’académie de Grenoble
Figure 10 Palmarès par sexe en mathématiques au concours des Olympiades de classe de quatrième de 2014 à 2017 dans l’académie de Grenoble
http://www.ac-grenoble.fr/disciplines/maths/articles.php?lng=fr&pg=218
Le plafond de verre en sciences surgirait ainsi dès l’enseignement secondaire (voire plus tôt selon certains travaux), sans discrimination apparente à sa genèse. Alors que les normaliennes scientifiques et les polytechniciennes ont obtenu davantage de mention très bien au baccalauréat que leurs homologues masculins, au concours général les garçons ont l’avantage.
100% des primés normaliens scientifiques ayant obtenu une mention au concours général sont des garçons, soit 10,5% des normaliens masculins. L’écart est moindre chez les polytechniciens, 5,3% des polytechniciens masculins ayant obtenu une mention au concours général contre 3,9% des polytechniciennes. Parmi les polytechniciens ayant obtenu une mention au concours général tous sexes confondus, 94% sont des garçons et 6% sont des filles.
Peu ou pas de changement significatif au niveau international
Au niveau international, entre 1936 et 2018, sur une soixantaine de lauréats de la médaille Fields (plus haute distinction en mathématiques, équivalente du prix Nobel), une femme a été primée en 2014 : il s’agit de l’iranienne Maryam Mirzakhani.
Des travaux montrent que désormais les femmes sont favorisées dans le recrutement dans les disciplines mathématisées (Williams & Ceci, 2015) : elles ont deux fois plus de chances d’être recrutées à profil équivalent d’après une étude de testing où des CV identiques ont été envoyés à des recruteurs dans les universités américaines. Certains auteurs affirment que la discrimination de genre a cessé d’être une cause importante de la sous-représentation des femmes dans les filières mathématisées9
(Ceci, Kahn, Ginther, & Williams, 2014). On peut se dire qu’il faudrait donc du temps pour que les effets se fassent sentir. A cet égard, on peut s’en référer à l’histoire du XXème siècle pour examiner, à la lumière des changements spectaculaires dans la condition féminine, comment la part de femmes au sein des lauréats du prix Nobel en sciences physiques et en chimie a évolué. Au cours de la période « inégalitaire » où la première vague du courant féministe n’avait pas encore remporté ses revendications (le droit de vote) dans la majeure partie des pays occidentaux, soit de 1901 à 1918, 5% des consécrations du prix Nobel en sciences physiques et en chimie étaient féminines.
De 1919 à 1968, dans un contexte de démocratisation et de soviétisation, les femmes obtiennent massivement le droit de vote, soit l’égalité politique de la première vague féministe, le taux de féminisation du prix Nobel étant alors de 2%.
De 1969 à 1999, la deuxième vague féministe aboutit à ses fins, l’égalité en matière professionnel et les droits reproductifs étant consacrés. Plus généralement cette période correspond à l’égalité formelle en matière socio-économique. Surtout, cette période se caractérise-t-elle par l’entrée massive des femmes dans l’enseignement supérieur et le monde du travail. Mais, aucune femme n’est récipiendaire du prix Nobel en sciences de la matière, ni en sciences physiques ni en chimie.
La troisième vague féministe de 2000 à 2021, se focalise sur la construction sociale du genre, la lutte contre les discriminations en dépit de droits formels et en somme un objectif d’égalité de résultats qui se substitue au précédent objectif d’égalité devant la loi. Les mesures de discrimination dite positive s’y multiplient. La révolution numérique démocratise l’accès à l’information, permettant de plus en plus de se départir des barrières de naguère. L’obtention de prix Nobel en sciences de la matière est alors de 4%.
Ainsi, quelle que soit la période considérée, la part de femmes remportant un prix Nobel en sciences de la matière ne dépasse pas 5% et s’élève à 2% entre 1901 et 2021.
En informatique, on note une évolution forte dans les dernières années. Alors qu’aucune femme n’avait été primée au prix Alan Turing en informatique entre 1966 et 1999, 9% des récipiendaires de cette plus grande distinction internationale sont des femmes entre 2000 et 2021. Depuis la création du prix en 1966 jusqu’en 2021, les femmes constituent 4% des gagnants.
Avantages comparatifs ou avantages absolus selon le quantile de distribution
L’orientation scolaire sexuée peut résulter en partie des avantages comparatifs ou absolus pour reprendre la terminologie d’Adam Smith et de David Ricardo. Par exemple, si les filles ont de meilleurs résultats que les garçons dans les disciplines littéraires mais aussi dans les sciences dures quoique dans une moindre mesure, alors elles peuvent être davantage portées à s’orienter dans les filières littéraires. Leur avantage comparatif est dans ce cas de figure dans les disciplines littéraires malgré un avantage absolu à la fois sciences et en lettres. L’hétérogénéité le long de la distribution en mathématiques peut conférer un avantage absolu aux garçons alors même qu’ils ne disposent d’aucun avantage au niveau moyen ou médian.
A niveau scolaire équivalent, les filles candidatent moins en filière scientifique dite « S » (premier filtre dans le sous-ensemble des « bons élèves » de seconde générale eux-mêmes déjà fruit d’un filtre parmi les collégiens (cf. aussi (Hulin, 2008)). Les filles ont pourtant de meilleurs taux de réussite au baccalauréat scientifique (« bac S ») et obtiennent davantage de mentions que leurs homologues masculins.
A niveau scolaire équivalent, les filles candidatent moins en classe préparatoire aux grandes écoles scientifiques (CPGE) mathématiques-physique (MP) ou physique-chimie (PC), soit un deuxième filtre puisque 14% des élèves d’une cohorte de 6ème en 1995 parviennent en Terminale S sans avoir redoublé et 14% des bacheliers S en 2008 s’orientent en CPGE scientifique (0,14*0,14=0,0196 d’où l’on tire que 2% d’une cohorte de 6ème intègre une CPGE scientifique MP ou PC).
En CPGE scientifique, les filles accèdent moins souvent en classe étoile correspondant aux classes d’élite (troisième filtre) : plus généralement les filles abandonnent davantage, leur part en seconde année (année du concours) étant moindre qu’en première année, «la compétition, dont on sait qu’elle est de plus en plus forte au fur et à mesure de l’avancée au sein de la filière CPGE (Darmon, 2013 ; Masy, 2014b), est préjudiciable aux femmes » (Dutercq & Masy, 2016). En CPGE MP et PC, les filles sont moins ambitieuses pour les plus grandes écoles quand on les interroge. Les filles sont également moins nombreuses à se présenter aux concours des plus grandes écoles (quatrième filtre), même en tenant compte de leur poids dans les effectifs (Blanchard, Pierrel, & Buisson-Fenet, 2017).
En parlant de la place des femmes en sciences, Michèle Leduc dit au sujet des filles en classe préparatoire aux grandes écoles : « L’investissement nécessité par les études de sciences les rebute, le concours très spécialisé, terrifiant par son petit nombre de places, de l’ENS-Ulm en sciences, ne les attire guère, les carrières de recherche qui en découlent les effraient d’avance. » (Leduc, 1995).
Parmi les candidats des grands lycées parisiens entre 2008 et 2013, le taux de réussite des filles des classes moyennes ou populaires à l’ENS en filière MP et PC est de 0% : aucune n’est admise. Les garçons des classes populaires ont un taux de réussite de 2,9% pas si éloigné que ça de celui des filles des classes supérieures (3,8%). Ce sont les garçons des classes moyennes (6%) et surtout des classes supérieures (9,7%) qui réussissent le mieux au concours d’entrée de l’Ecole normale supérieure.
Ainsi donc malgré une sélection drastique des filles, qui font l’objet d’un filtre à chaque étape du processus de sélection, à l’arrivée leur taux de réussite à l’ENS en MP et PC est moindre.
Lecture : Parmi les filles de classes supérieures candidates à l’ENS aux concours MP et PC entre 2008 et 2013, 3,8% ont été déclarées admises.
De façon plus spectaculaire, le CREDOC a pu illustrer que malgré l’acquisition d’un plus haut niveau de formation, les femmes pouvaient obtenir des résultats contre-intuitifs quand certaines questions leur étaient posées. Le CREDOC a ainsi mené une enquête sur la culture financière des Français (Bigot, Croutte, & Muller, 2011). La proportion d’individus qui disent ne pas être à l’aise en calcul est de 16% chez les hommes contre 28% chez les femmes. Malgré tout, comme il ne s’agit que de ressenti, par nature subjectif, on peut se demander ce qu’il en est réellement. Le CREDOC a ainsi posé la question suivante : « Imaginons que vous placiez 100 euros sur un compte rémunéré à 2% par an. Vous ne faites plus aucun versement sur ce compte et vous ne retirez pas non plus d’argent. Combien aurez-vous sur votre compte un an plus tard, une fois les intérêts versés ? ». Le CREDOC constate que 64% des hommes ont trouvé la bonne réponse contre 39% des femmes. Surpris par l’ampleur de ce résultat, le CREDOC a cherché à neutraliser les effets de structure mais constate : « Rien n’y fait : les modèles économétriques confirment qu’à âge égal, profession comparable, niveau de revenu similaire et diplôme équivalent, les hommes trouvent bien plus souvent la bonne réponse que les femmes ».
Par ailleurs, le sentiment de compétence financière est plus fréquent chez les hommes que chez les femmes. Cet exemple illustre parfaitement le fait qu’être aussi voire plus diplômé ne confère pas toujours un avantage exploitable pour maximiser ses intérêts financiers : c’est reconnaître « l’illettrisme économique et financier auquel les femmes, plus que les hommes, sont sujettes, indépendamment du niveau d’étude et de revenu. » (Rubinstein, 2019). Ainsi, comme le mentionne Marianne Rubinstein, en dépit d’un niveau d’éducation plus élevé et d’une forte participation au marché du travail, et ce même pour les jeunes générations, les femmes sont davantage touchées par l’illettrisme financier, ce que confirme l’OCDE pour qui d’ailleurs l’alphabétisation financière est potentiellement décisive dans la vie des gens, dans leurs opportunités, dans leur succès. Le sondage de la TNS Sofres mené en 2012 (il s’agit de savoir de quelle somme on dispose au bout d’un an lorsqu’au départ il y a avait 1000 euros placés à 2% de taux d’intérêt sans retrait ni versement sur ledit compte) aboutit également à des écarts importants entre les sexes bien que cette fois une tentative d’explication repose sur l’argument des femmes qui seraient plus souvent non diplômées : « On peut noter un écart homme/femme de 13% qui est relativement significatif et à rapprocher d’un effet de structure démographique, la proportion de femmes non diplômées étant plus élevée que celle des hommes non diplômés au sein de la population. » (Haas, 2012).
En examinant le pourcentage d’adultes ayant des connaissances financières suffisantes de l’échantillon, par pays et par sexe, Allianz s’aperçoit que l’écart entre hommes et femmes est assez conséquent, notamment en Espagne (31,8% pour les hommes contre 13,3% pour les femmes), en Allemagne (39,0% pour les hommes contre 24,7% pour les femmes) et en Italie (44,7% pour les hommes contre 24,0% pour les femmes).
Des biais des enseignants en faveur des filles en mathématiques, soit une discrimination dite positive
Selon l’OCDE, les filles en France consacrent près de deux heures supplémentaires par semaine aux devoirs par rapport aux garçons (Borgonovi & Achiron, 2015) tandis que d’autres travaux montrent des résultats similaires entre les sexes en mathématiques lors de l’épreuve du diplôme national du brevet (Breda, Grenet, Monnet, & Van Effenterre, 2018). L’OCDE montre ainsi que le différentiel de performance, à l’avantage des garçons, en sciences et en mathématiques serait encore un peu plus marqué à temps égal consacré aux devoirs (cf. le graphique 2.13 de l’OCDE).
Par ailleurs, les femmes sont avantagées à l’oral au concours d’entrée à l’ENS dans les matières les plus dominées par les hommes (mathématiques, physique, philosophie), l’inverse étant vrai pour les disciplines littéraires dominées par les femmes (Ly & Breda, 2014). Les jeunes femmes ne sont donc pas nécessairement discriminées lorsqu’elles tentent d’intégrer les disciplines traditionnellement dominées par les hommes (Ly & Breda, 2014).
Ce qui est vrai aux concours d’entrée de l’ENS semble l’être aussi pour l’École polytechnique, les responsables reconnaissant faire des efforts pour que davantage de filles y soient admises (Floc’h, 2014) : or, au concours d’entrée, les garçons réussissent mieux à l’écrit qui est anonyme10
alors que les filles y réussissent mieux à l’oral (Heidsieck, 2018). Cette discrimination en faveur des femmes serait également à l’œuvre dans l’enseignement secondaire, les filles bénéficiant de notes biaisées, obtenant ainsi 6% de plus que des garçons similaires (quand les tests ne sont pas anonymes), ce qui expliquerait leur progression scolaire tout au long de leur scolarité en mathématiques, sans que ce biais évaluatif puisse être attribué au comportement en classe (Terrier, 2014).
Grégory Rozières note :
« Discrimination positive en maths, physique-chimie et philo
Dans une étude publiée dans Science vendredi 29 juillet, Thomas Breda et Mélina Hillion, chercheurs au CNRS, sont arrivés à ce résultat qui peut paraître contre-intuitif en analysant les résultats des différents concours: le CRPE (professeur des écoles), le Capes et l’agrégation (lycées et collèges). Au total, plus de 100.000 personnes ayant passé ces examens entre 2006 et 2013 ont été analysées.
A chaque fois, plusieurs tests écrits, puis oraux ont lieu. Les chercheurs ont donc comparé les résultats des candidats à l’écrit, où le jury ne pouvait pas connaître le sexe de la personne, et à l’oral. Pour le concours de professeur des écoles, qui n’est pas lié à une matière particulière, aucune différence n’a été noté.
Par contre, pour le Capes et l’agrégation, ce n’est plus la même chose, précise l’étude: « Dans les domaines où les femmes sont sous-représentées (mathématiques, physique chimie et philosophie), les examens oraux favorisent les femmes plutôt que les
hommes ». Et ce à la fois pour le Capes et pour l’agrégation (plus difficile).
L’exemple est flagrant pour les mathématiques où les résultats des femmes lors des oraux sont 10% supérieurs à leurs résultats à l’écrit, par rapport aux hommes. Dans les domaines où les hommes sont sous-représentés, les chercheurs ont aussi remarqué un effet similaire, mais bien plus faible. »« Thomas Breda et Mélina Hillion imaginent enfin trois choses à changer dans les politiques publiques pour diminuer ces écarts de représentativité au vu de ces résultats:
(Rozières, 2016).
• Les politiques actives visant à réduire les stéréotypes et la discrimination devraient se concentrer sur les élèves encore jeunes, avant qu’ils ne choisissent leur orientation
• Les examens et les embauches ne devraient pas être anonymisés pour réduire les inégalités de sexe
• Il serait bon, pour les encourager, de mettre en avant le fait que les femmes, si elles choisissent des domaines où les hommes sont majoritaires, ont plus de chances de réussir »
Ainsi, est-il préconisé de ne pas recourir à des procédures anonymes afin de pouvoir discriminer en faveur des filles.
Ces discriminations dites positives existent aussi en Australie de façon plus explicite, des points supplémentaires étant accordés aux filles pour intégrer les filières scientifiques universitaires à l’Université de technologie de Sydney (Martin, 2019). Au Royaume-Uni, l’Université d’Oxford a allongé le temps des épreuves de mathématiques pour réduire le différentiel sexué de performance (Matthews, 2018).
D’ailleurs, la discrimination dite positive semble pratiquée de longue date puisqu’on trouve depuis au moins 1995 des références à cette pratique dans la littérature académique : « Enfin il est clair qu’il faudra rediscuter sans préjugé l’hypothèse des quotas de filles, déguisés ou affichés, permanents ou progressivement décroissants en fonction de l’évolution. Cette hypothèse nous choque aujourd’hui, mais il faut se garder des tabous. Après tout certaines grandes écoles de commerce françaises pratiquent bien les quotas sans le dire par le biais des oraux. » (Leduc, 1995).
Il y a toute apparence que le différentiel d’appétence et de performance soit à l’origine des disparités ce qui a conduit certains à vouloir mettre en place et pérenniser des quotas.
La réticence à évoluer dans un environnement fortement concurrentiel est avancée comme une explication à la sous-représentation des filles dans les filières d’élite11: « Les filles ont à pâtir de cet élitisme qui peut revêtir pour elles un caractère destructeur. » (Leduc, 1995).
Le goût pour la compétition est un bon prédicteur des choix de spécialisation scolaire en mathématiques en Suisse au lycée (Buser, Peter, & Wolter, 2017) : en suivant à partir d’un échantillon de 1514 élèves de l’enseignement secondaire dont 259 ont choisi la formation sélective (baccalaureate) l’expérience de faire passer des épreuves rémunérées (rémunération à la pièce ou alors par mode compétitif) avec la possibilité de choisir un mode de rémunération basée sur la compétition a permis d’apprécier le lien avec les choix d’orientation scolaire. Les élèves qui ont une appétence pour la compétition ont 12 points de plus de choisir une spécialisation de type mathématiques ou sciences physiques. Les filles sont moins disposées à choisir ces spécialisations mais quand on tient compte de la disposition à concourir, l’écart se réduit de 17%. L’appétence pour la compétition explique donc une partie de l’autosélection dans les filières (Browne, 2006).
On peut se demander si la crainte de discrimination ou d’une ambiance délétère peut être à l’origine d’abandons ou de réticence à s’inscrire dans les filières scientifiques, mais la part de femmes suivant des cours de MOOC (Massive Open Online Course) n’est pas non plus paritaire, comme on peut le constater avec des données 2012-2013 (Jiang, Schenke, Eccles, Xu, & Warschauer, 2016). Les MOOC sont des cours en ligne qui présentent l’avantage d’être, sauf exception, dépourvus de sélection à l’entrée, gratuit, accessible à distance et donc avec une flexibilité pour s’organiser mais aussi d’éviter des interactions potentiellement nuisibles en présentiel (harcèlement…). Il n’y a donc pas de barrière à l’entrée.
Avant la réforme de 2018 dans le cadre de la loi « Orientation et réussite des étudiants » créant Parcourssup, l’accès en première année à l’Université hors IUT est non sélectif dès lors que l’étudiant est titulaire du baccalauréat. Néanmoins, entre 2009 et 2017, dans les filières sous tension, la plateforme admission postbac12 (créée en 2002 initialement pour les filières sélectives) permettait de recourir à un tirage au sort quand le nombre de places était insuffisant. Les filières scientifiques telles que les mathématiques, les sciences physiques, la chimie, la biologie, les sciences de la vie et de la terre étaient rarement, voire jamais sous tension. On peut considérer qu’avant 2018, aucune discrimination n’était possible pour s’inscrire dans les filières scientifiques à l’Université dès lors qu’on était titulaire du baccalauréat si bien qu’il est intéressant d’examiner la part de filles dans les filières scientifiques avant la réforme de 2018 et a fortiori avant 2002 (la généralisation aux filières non sélectives ayant eu lieu entre 2005 et 2009 puis une généralisation au niveau national entre 2009 et 2017). En Ile-de-France, entre 1987 et 2004, la plateforme RAVEL recensait les vœux des lycéens13.
Or, entre 1970 et 1990, la part de filles en sciences à l’Université était de l’ordre du tiers des effectifs, cette part étant supérieure à 60% dans les sciences humaines au cours de la même période. Il est donc clair qu’en l’absence de sélection à l’Université, il n’y avait pas de parité en sciences, la part de filles étant de l’ordre du tiers dans les disciplines scientifiques (Lelièvre & Lelièvre, 1991).
Le rôle des préférences dans l’orientation
Certains travaux montrent que les femmes de l’élite scolaire en sciences en France (normaliennes, polytechniciennes), font des choix délibérés14 de poursuivre ce qui les intéresse plutôt que de s’engager
systématiquement dans une voie prestigieuse (Ferrand, Imbert, & Marry, 1996). Des résultats concordants sont obtenus aux Etats-Unis à partir de l’étude des disciplines universitaires choisies dans des cohortes de hauts potentiels des deux sexes, en s’appuyant sur les scores des tests standardisés Source spécifiée non valide., ces choix se concrétisant par de hauts niveaux de satisfaction ultérieurement dans la vie professionnelle dans le milieu de la trentaine, peu de regrets étant exprimés (Benbow, Lubinski, Shea, & Eftekhari-Sanjani, 2000). Pourtant, Lubinski et Benbow montrent que les femmes à haut potentiel sont surreprésentées dans les humanités, les sciences de la vie et les sciences sociales alors que les hommes le sont dans les mathématiques, les sciences physiques, l’informatique et l’ingénierie. Malgré cette « ségrégation » universitaire au sein d’un sous-ensemble d’une cohorte de hauts potentiels, les niveaux de satisfaction par sexe sont comparables (Lubinski D. , Benbow, Webb, & Bleske-Rechek, 2006).
La raréfaction des femmes dans les filières scientifiques d’enseignement supérieur en France ne résulte pas d’une inaptitude féminine mais d’une désaffection qui se traduit par une orientation plus conséquente dans d’autres filières, soit une rémanence des conceptions obsolètes leur déniant de bonnes capacités en sciences (Hulin, 2008). Selon Hulin (2008), ces blocages culturels pourraient être sensiblement atténués, à la faveur d’une meilleure connaissance de l’histoire des femmes scientifiques qui est celle d’une progression continue mais dont les succès féminins sont par trop méconnus.
La menace de stéréotype ne semble pas jouer le rôle prépondérant qu’on lui impute
La menace de stéréotype correspond au fait qu’un individu membre d’un groupe socialement stigmatisé (par un stéréotype négatif) ressente une anxiété quand le stéréotype est activé, de sorte que l’individu tende à confirmer le stéréotype, par une performance amoindrie en raison du stéréotype rendu saillant. L’insistance sur l’identité ou son simple rappel avant une épreuve peut également activer le stéréotype.
La parution de The bell curve en 1994 (Hernnstein & Murray, 1994) a suscité une immense polémique du fait que les auteurs aient suggéré que les écarts ethniques de performance constatés aux tests d’intelligence (quotient intellectuel) pourraient s’expliquer en partie par des facteurs génétiques. L’année suivante des psychologues démontraient l’existence de la menace de stéréotype lorsqu’un groupe est stigmatisé avant de passer un test cognitif (Steele & Aronson, 1995) suggérant ainsi que le fait d’inférer à partir de tests de performance un potentiel inné était une conclusion hâtive, la démonstration étant fausse par ce raisonnement trop simpliste : la performance elle-même dépend du contexte (Diaye, 2001). Depuis lors les experts en sciences sociales ne peuvent ignorer cette interaction complexe entre stigmatisation et performance. En fait, les prophéties autoréalisatrices ont été mises en évidence en sociologie depuis 1948 (Merton, 1948).
Néanmoins, il reste à déterminer dans quelle mesure la menace de stéréotype explique les écarts de performance entre les groupes défavorisés et les autres. Ainsi, certaines critiques se sont élevées pour souligner certains écueils (Ganley, Mingle, Ryan, Ryan, & Vasilyeva, 2013) tels que les biais de publication (Flore & Witcherts, 2015) et les généralisations hâtives des expériences menées en laboratoires au monde réel, tout particulièrement s’agissant de l’ampleur de la menace de stéréotype (Stoet & Geary, Can stereotype threat explain the gender gap in mathematics performance and achievement?, 2012). Certains chercheurs (Sackett, Hardison, & Cullen, 2004) ont soulevé des problèmes méthodologiques s’agissant de l’étude de Steele and Aronson, mettant en exergue que ces derniers avaient réalisé un ajustement statistique des résultats des étudiants au test en prenant en compte leurs résultats antérieur aux tests SAT. Par ailleurs, en analysant 20 tentatives de réplications of de la menace de stéréotype des femmes en mathématiques (Stoet & Geary, Can stereotype threat explain the gender gap in mathematics performance and achievement?, 2012) des chercheurs ont démontré, que seulement 55% des études sont parvenus à répliquer les travaux pionniers en la matière mais pratiquement toutes ces réplications apparemment réussies (8/11) avaient également ajusté les scores (une fois de plus en s’appuyant sur les scores aux tests SAT).
Ces résultats mettent à mal l’importance du rôle des stéréotypes, dans la mesure où les différences constatées lors de l’évaluation de la menace de stéréotype, pourraient provenir de différences dans les scores aux tests SAT antérieurs, ce qui peut remettre en question sa pertinence pour expliquer les disparités constatées15. Il faut garder à l’esprit que la variable examinée est la différence dans les scores en mathématiques, en supposant que les groupes ne diffèrent pas quant à leurs compétences en mathématiques auparavant. Dans l’éventualité où ils différent cet écart pourrait s’expliquer par cette disparité, ce qui rendrait caduc la menace de stéréotype. Certains chercheurs ont ainsi remis en question l’interprétation canonique des résultats de Steele and Aronson en précisant qu’environ 90% des interprétations à leur disposition omettaient l’ajustement par les scores SAT en soutenant que l’écart entier entre les deux groupes peut s’expliquer par la menace de stéréotype alors qu’au mieux elle n’est à même d’expliquer que l’écart entre étudiants de même niveau. Ainsi, les mauvaises interprétations sont monnaie courante laissant croire, alors même qu’il y a ajustement par les scores de SAT, que l’écart entier entre les groupes pourrait s’expliquer par la menace de stéréotype (Sackett, Hardison, & Cullen, 2004).
S’agissant des questions de genre, une étude néerlandaise vient affaiblir la portée de la menace de stéréotype dans le monde réel, en s’appuyant sur un échantillon de grande taille contrairement à la plupart des études pour tester la validité de la menace de stéréotype : en collectant des données sur 2067 élèves (dont 946 filles), âgés de 13 ou 14 ans et en utilisant une analyse bayésienne, les chercheurs montrent avec une plus grande robustesse que la menace de stéréotype n’a pas d’impact significatif sur la performance des filles en mathématiques (Flore, Mulder, & Wicherts, 2019). Le stéréotype est activé en mentionnant au groupe traité qu’une étude antérieure portant sur le test de mathématiques révèle des écarts de performance entre garçons et filles. Le groupe de contrôle lui se fait lire un texte précisant qu’il n’y a pas de différence de performance entre garçons et filles. L’échantillon est plus conséquent que celui utilisé dans d’autres travaux par exemple 28 hommes et 28 femmes, puis 30 femmes et 24 hommes et 36 femmes et 31 hommes (Spencer, Steele, & Quinn, 1999).
En somme, nonobstant son existence bien établie en laboratoire, pour autant que les groupes comparés soient de niveau similaire, la pertinence de la menace de stéréotype semble largement surestimée dans le monde réel. En effet, contrairement aux expériences de laboratoire, dans la réalité, la menace de stéréotype n’est pas activée avant les épreuves d’examen. Les surveillants de l’épreuve (de mathématiques) ne rappellent pas aux filles des stéréotypes de genre juste au début de l’épreuve, si bien que la menace de stéréotype n’apparaisse pas nécessairement dans la réalité.
Des biais de publication sont en outre déplorés (Flore & Witcherts, 2015), en raison de la tendance à ne publier que les études trouvant un résultat significatif quant à la menace de stéréotype ou pire du recours au p-hacking (une technique statistique qui consiste à ne publier que les compositions d’échantillon et les périodes d’observation favorables à l’hypothèse testée).
Le paradoxe de l’égalité des genres en matière scientifique dans les pays nordiques
On constate un « gender equality paradox » (Stoet & Geary, The Gender-Equality Paradox in Science, Technology, Engineering, and Mathematics Education, 2018). Les femmes s’engagent moins dans les filières scientifiques dans les pays les plus égalitaires que dans ceux qui ont nettement moins développé des politiques d’égalité. La part de femmes parmi les étudiants en sciences (STEM) dépasse les 35% en Indonésie, en Turquie, aux Emirats arabes unis, en Tunisie, au Vietnam, en Albanie et même 40% en Algérie (Geary & Stoet, 2018). A l’inverse, elle est inférieure à 30% au Danemark et même à 25% en Suède, en Finlande et en Norvège. Or, les pays scandinaves sont les plus avancés en matière d’égalité de genre, en particulier en comparaison avec des pays du Moyen-Orient ou d’Afrique du nord. Il y a donc un paradoxe à constater des choix d’orientation plus genrés (moins de femmes en sciences) dans des pays plus sensibles à l’égalité des sexes. Certains universitaires comme le psychologue Jordan Peterson y ont vu l’invalidation du socio-constructivisme.
Selon Stoet et Geary, le simple examen des moyennes de performance ne suffit pas à élucider le paradoxe : il faut examiner les avantages comparatifs (Ricardo, 1817) et non pas absolus dans les matières scientifiques et littéraires, un phénomène de spécialisation sexuée étant à l’œuvre même quand les filles ont de meilleurs résultats en science que les garçons, comme c’est le cas en Finlande. Ainsi, aux Etats-Unis, la part de filles est-elle plus importante au sein du groupe d’élèves à haut niveau à la fois en mathématiques et dans les tests verbaux que dans le groupe à haut niveau en mathématiques mais au niveau modéré dans le domaine verbal (Wang, Eccles, & Kenny, 2013). Or, les profils à haut niveau mathématique mais de performance modérée dans le domaine verbal sont plus susceptibles de choisir des filières scientifiques. En somme, ceux qui ont un niveau élevé dans les deux domaines sont plus susceptibles de choisir le domaine littéraire.
Certains chercheurs ont cherché à résoudre le paradoxe mais leur réponse n’en est pas moins quelque peu paradoxale16 : « Ces différences, qui peuvent aussi contribuer aux inégalités économiques entre hommes et femmes, sont susceptibles de perdurer même quand les pays se développent. Ce n’est pas parce qu’elles sont innées mais parce qu’elles sont le produit de nouvelles formes de différentiation sociale entre hommes et femmes, qui ont remplacé l’idéologie de la prééminence masculine. » (Breda, Jouini, Napp, & Thebault, 2020). En substance, dans les pays développés les plus en pointe pour promouvoir l’égalité des sexes et l’avancement des femmes, de nouvelles différentiations sociales auraient cours de sorte qu’on aboutisse à un résultat contre-intuitif : il y a proportionnellement moins de femmes en sciences que dans des pays moins développés. Plus un pays est égalitaire du point de vue du genre et développé, plus il y a de stéréotypes de genre dissuadant les filles de faire des maths. L’essentialisme de genre (idéologie différentialiste mais non nécessairement inégalitaire en pratique) aurait pris le relais de la suprématie masculine (inégalités juridiques ou discrimination dans les pratiques sociales au détriment des femmes). Ne pouvant plus réaliser leur performance de genre (au sens de Judith Butler) par des discriminations sexuées explicites, les individus se construiraient leur identité de genre par ces croyances en la différence innée des sexes, dans des sphères de choix personnels. Ces travaux se basent sur l’examen de 64 pays !
Il semblerait qu’on ait ici une sorte d’irréfutabilité au sens de Karl Popper : si l’on avait constaté que dans les pays nordiques plus féministes, les femmes s’engageaient plus dans les filières scientifiques alors on aurait pu dire que les stéréotypes de genre y sont moins prégnants grâce aux politiques d’égalité mais si au contraire l’on constate les femmes s’y engagent moins dans les filières scientifiques alors on déduit que les stéréotypes de genre y sont plus puissants ayant pris une autre forme. Dans tous les cas, quels que soient les résultats la conclusion semble irrémédiable : seuls les stéréotypes de genre seraient à même d’expliquer les disparités et l’on ne pourrait donc se contenter de se borner à constater des différences d’appétence.
La relative bienveillance du monde enseignant est d’ailleurs interprétée de façon irréfutable au sens de Popper comme étant préjudiciable aux filles : « Ainsi, bien qu’au total les filles reçoivent plus d’appréciations positives et moins d’appréciations négatives, tant l’occurrence de ces jugements que l’attribution faite par les maîtres les inviteraient à expliquer leurs échecs par des facteurs stables et incontrôlables (manque d’aptitude par exemple), et non par des facteurs comme la motivation ou l’effort (cette « learned helplessness » dont nous avons parlé dans la Ve partie). On comprendrait ainsi que les garçons aient plus de confiance en eux alors même qu’ils reçoivent plus de critiques et moins de compliments… » (Duru-Bellat, 1995).
Ce qui est désigné comme la ségrégation dans l’emploi pourrait bien résulter du fait que les femmes soient relativement plus réfractaires à occuper des métiers techniques, les données autrichiennes indiquant que plus la part de filles est importante dans les classes antérieures au moment de l’orientation, plus elles choisissent des filières techniques ou scientifiques (Schneeweis & Zweimüller, 2009). Même en Inde, les filles sont moins susceptibles de s’orienter en sciences, même en contrôlant par le niveau en sciences avec 20% de moins de chances de s’y orienter (Sahoo & Klasen, 2018). Cet écart n’est pas si éloigné de ce qu’on observe en France : « 44% des garçons de seconde GT s’orientent vers une première S l’année suivante, ce n’est le cas que de 35% des filles » (Breda, Grenet, Monnet, & Van Effenterre, 2018).
Les stéréotypes de genre et leur lien avec la réalité : le cas des enseignants
En réalité, l’on peut se poser la question du lien de causalité entre stéréotypes et réalité observée car en fait des travaux menés en Italie par l’économiste Michela Carlana quant à l’impact des biais genrés des enseignants sur leurs élèves «Les stéréotypes de genre de enseignants comportent une part de vérité »17 précisant d’ailleurs que « Par exemple, les filles sont 1,6 fois plus nombreuses que les garçons au sein du top 10% de la distribution en lecture, mais 1,5 fois moins nombreuses dans le top 10% en mathématiques »18 (Carlana, 2019) : même si de prétendus biais mesurés par un test d’association implicite auquel les enseignants se sont soumis, sont mis en évidence en lien avec l’attitude des filles scolarisées au collège, il est intéressant de noter dans le secondaire que malgré une écrasante majorité de femmes parmi les enseignants (« La plupart des enseignants sont des femmes (81% en mathématiques et 90% en littérature). »19), le différentiel sexué de performance et surtout de d’orientation en mathématiques persiste, alors même que d’autres chercheurs prétendent que « avoir des femmes dirigeantes réduit le biais implicite à l’encontre des femmes » (Glover, Pallais, & Pariente, 2016). 20
L’écart de performance sexué généré par un enseignant biaisé est de l’ordre de 3% d’un écart-type, soit l’équivalent d’un dixième de point sur une échelle de notation de 0 à 20 (Carlana, 2019). L’écart brut de score en mathématiques entre garçons et filles étant de l’ordre de 20% d’un écart-type, c’est déjà une petite taille d’effet. La première variable explicative du modèle est le sexe (17% d’un écart-type de l’écart de score en mathématiques), ce qu’elle ne commente pas (expliquant 85% de l’écart sexué contre 15% pour le biais d’enseignant). Il y a pléthore de variables explicatives, mais elles apparaissent non significatives.
Les stéréotypes de genre et leur lien avec la réalité : le cas des parents
Pour expliquer que malgré le fait qu’un pays soit développé et tendanciellement plus égalitaire ou plus féministe, il y ait une orientation plus genrée en mathématiques, une des idées de l’article de Breda et al. (2020) est de mesurer les stéréotypes de la façon suivante : examiner la différence de genre à niveau équivalent par sexe dans les tests d’aptitude21. Il s’avère ainsi que « les filles veulent avant tout « aider, soigner et s’occuper des autres » (ce type de motivation vient au 1er rang pour les filles et au 2e chez les garçons), ou encore« informer et communiquer », tandis que les garçons mettent en avant le fait d’« étudier, rechercher, inventer », d’« organiser, encadrer, diriger », ou encore de « fabriquer, réaliser, produire ». En outre, les jeunes filles doutent de leurs compétences dans les professions «masculines», qu’elles tendent à juger plus difficiles que les professions traditionnellement féminines » (Duru-Bellat, 1995).
Les préférences des élèves pour telle ou telle matière sont d’ailleurs corrélées à leur perception de la difficulté de ladite matière.
Mais au fond, l’approche de cet article (Breda, Jouini, Napp, & Thebault, 2020) repose sur le postulat suivant lequel toute différence d’appétence est perçue comme une anomalie à corriger, avec nécessairement un coupable qui peut être le parent, l’enseignant, la société, la presse etc. à l’origine du stéréotype.
Les parents envisagent en 1992 et en 2003 un niveau d’études globalement plus élevé pour leurs filles que pour leurs garçons (Gouyon & Guérin, 2007). Mais, ils souhaitent davantage que leurs garçons intègrent la filière scientifique du baccalauréat que leurs filles. Cela dit, 31,6% des parents souhaitent un baccalauréat scientifique pour leur garçon contre 28,3% pour leur fille, soit un écart de 3,3 points (parents d’enfants scolarisés au collège ou en seconde générale à la rentrée 2003).
Le rôle des normes sociales dans les choix de filières scientifiques
Après la chute du mur de Berlin en 1989, un afflux important d’immigrés de l’ex-Union soviétique en Israël a permis de comparer les trajectoires scolaires et professionnelles des filles natives avec qui ont immigré à un très jeune âge puisque très souvent nées entre 1987 et 1989 (99% de l’échantillon) ou arrivées avant l’âge de six ans (Friedman-Sokuler & Senik, From Pink-Collar to Lab Coat. Cultural Persistence and Diffusion of Socialist Gender Norms, 2020). Il s’avère que les filles issues de l’immigration soviétique sont davantage susceptibles de s’engager dans les sciences (STEM) que leurs homologues natives ou provenant d’autres flux migratoires.
Dans l’enseignement secondaire, parmi les filles immigrées de l’ex-Union soviétique, 18% choisissent un cours de mathématiques avancées contre 14% des natives israéliennes et 12% des filles immigrées d’autres zones géographiques. Pour les STEM, ces chiffres sont respectivement 33% pour les filles immigrées soviétiques, 26% pour les natives et 24% pour les filles immigrées nées ailleurs. A l’inverse, les filles issues de l’immigration soviétique choisissent moins les science sociales (28%) que leurs paires natives (34%) et que les autres filles (27%).
Dans l’enseignement supérieur, on retrouve des tendances similaires. Le choix des STEM est effectué par 13% des filles immigrées de l’ex-Union soviétique, 10% des natives israéliennes et 8% des filles immigrées d’autres zones géographiques.
Néanmoins, les scores obtenus par les filles immigrées soviétiques dans les tests en mathématiques sont inférieurs à ceux des natives et des autres filles immigrées.
Cette expérience naturelle en Israël suggère ainsi que les filles peuvent choisir plus souvent des options scientifiques et mathématiques quand elles ont baigné dans des valeurs égalitaires et valorisant les sciences (en l’occurrence promues en Union soviétique). Rappelons qu’il s’agit de filles ayant immigré avant six ans et même dans la quasi-totalité des cas avant trois ans.
Une autre étude permet d’avoir une comparaison sexuée dans les choix de filières scientifiques dans l’enseignement secondaire en Israël (Friedman-Sokuler & Justman, 2018). Au lycée, ce sont 14% des filles des écoles de langue hébreu qui choisissent le cours de mathématiques avancées contre 16% des garçons, alors qu’on a vu précédemment que 18% des filles en Israël nées en Union soviétique faisaient ce choix. De façon intéressante, dans les écoles de langue arabe 12% des filles prennent l’option du cours de mathématiques avancées contre 8% des garçons.
En sciences physiques, informatique, biologie ou chimie, dans les écoles de langue hébreu, ce sont 31% des garçons et 26% des filles qui choisissent ces filières STEM alors qu’on a vu précédemment que 33% des filles en Israël nées en Union soviétique faisaient ce choix. De façon intéressante, dans les écoles de langue arabe en Israël 50% des filles prennent l’option du cours sciences physiques, informatique, biologie ou chimie contre 30% des garçons.
Conclusion
La concordance des stéréotypes de genre avec la réalité a fait l’objet de recherches. En particulier l’universitaire Lee Jussim souligne dans ses revues de littérature et ses travaux que les gens évaluent plutôt bien les tendances sexuées, les corrélations étant bien souvent supérieures 0,5. Il a même été montré que les personnes interrogées sur les tendances genrées quant à des tâches cognitives en évaluaient non seulement correctement le sens mais avaient tendance à sous-estimer les écarts (Halpern D. F., 2011). D’ailleurs, affirmer que « les hommes sont plus doués en maths » est considéré comme étant un stéréotype, partagé par près de 30% des garçons franciliens en classe de seconde générale et technologique (Breda, Grenet, Monnet, & Van Effenterre, 2018) et un peu moins en Terminale scientifique alors que les filles y adhèrent sensiblement moins (18,3% et 16,2%).
La meilleure réussite scolaire globale des filles tend à masquer des phénomènes plus subtils qui inversent cette tendance dans des sous-champs : queue de distribution, variance différente selon le sexe, situation de concours, exercices inhabituels, spécialisation en mathématiques…Les disparités d’effectifs dans les filières d’enseignement supérieur ainsi que dans les métiers de la recherche et de l’ingénierie reflètent essentiellement les choix d’orientation et les résultats aux concours et examens. Le point essentiel est qu’il semble que la répartition sexuée en sciences dites dures traduise, au moins en partie l’effet d’avantages comparatifs (pour les compétences proches de la moyenne dans l’enseignement secondaire) ou absolus (en queue de distribution des meilleures performances) : au sens de l’économiste David Ricardo, les garçons semblent disposer d’une avantage comparatif en mathématiques au niveau de la moyenne ce qui signifie que malgré des scores proches de ceux des filles c’est relativement leur point fort mais d’un avantage absolu dans le haut de la distribution, c’est-à-dire qu’il y a plus de garçons que de filles dans les scores élevés et en tout cas en situation de concours élitistes comme cela a été montré (olympiades, concours général, concours d’entrée aux grandes écoles scientifiques telles que l’école polytechnique, les écoles normales supérieures…).
Des notes équivalentes dans l’enseignement secondaire ne permettent pas d’inférer un même avenir dans les filières spécialisées de l’enseignement supérieur en raison de la nature différente des épreuves. Les résultats par sexe en moyenne très proches non plus. La surreprésentation masculine dans les hauts scores (Halpern D. F., 2011) ou en situation de concours ou encore face à des épreuves nouvelles (Chabanon & Jouvenceau, 2022 ) est à mettre en lien avec les jugements des parents et des enseignants qui peuvent donner l’impression fausse de n’être que des stéréotypes sans fondement. La réalité est plus nuancée. Si parents et enseignants sont susceptibles d’introduire des biais de genre avec un impact sur l’orientation scolaire, ils sont aussi et peut-être surtout bien placés pour apprécier les appétences et compétences des élèves.
Ainsi, Lee Jussim déplore-t-il que certains chercheurs se soient employés à occulter ou minimiser le lien pourtant établi entre stéréotypes de genre et réalité (Jussim, 2018). De même, David Geary soutient-il : « Les stéréotypes ne font que décrire les comportements typiques des garçons et des filles » (Strauch-Bonart & Sastre, 2021).
Certes, Pauline Givord met en avant les stéréotypes pour expliquer les choix de filières d’études ainsi que les préférences de métiers des adolescentes, mais il s’agit là d’une affirmation plutôt que d’une démonstration établie de façon détaillée (Givord, 2020). A partir de l’exemple d’Israël, Claudia Senik montre que les normes de genre ont un impact sur les choix de filières scientifiques, les filles issues de l’ex-Union soviétique se démarquant nettement des natives et des autres immigrées (Friedman-Sokuler & Senik, From Pink-Collar to Lab Coat. Cultural Persistence and Diffusion of Socialist Gender Norms, 2020). Néanmoins, les scores en mathématiques des jeunes immigrantes de l’ex-Union soviétique en Israël apparaissent moindres que ceux des autres filles, qu’elles soient natives ou immigrées d’autres pays.
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