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Le wokisme n’est pas une idéologie, mais une morale

Le wokisme prétend incarner la justice sociale et l’égalité des chances, mais ce n’est qu’une imposture dépourvue de fondement philosophique et de corpus théorique. Les jeunes qui s’identifient aux mouvements de la théorie critique de la race ou du genre n’ont même pas lu les auteurs qui ont élaboré ces théories. Au lieu de comprendre les implications politiques et philosophiques de leurs actions, ils adhèrent à une posture de militantisme moral.

En France, le wokisme a trouvé un terrain fertile dans le milieu universitaire, où certains se servent de l’institution pour promouvoir leur vision moralisatrice et la légitimer. Souvenons-nous de la polémique suscitée par le projet de loi « confortant le respect des principes de la République » et notamment l’article 14 qui prévoyait de renforcer les obligations de neutralité des personnes travaillant dans les services publics, y compris dans les établissements d’enseignement supérieur. Cette disposition a été vivement critiquée par certains universitaires qui y prétendaient y voir une atteinte à la liberté académique et à l’autonomie des établissements. Ils cherchaient en réalité le clash politique et par ce biais, à imposer leur vision du monde en utilisant des méthodes de pression, de censure et de discrédit pour faire taire toute forme de critique. L’Université ne sert plus à produire une pensée scientifique, mais à cautionner une pensée morale qui tente d’imposer sa vision du monde.

Les jeunes qui se réclament des mouvements de la théorie critique de la race ou du genre ne connaissent pas ces auteurs et ne les ont pas lus: prétend-on sincèrement qu’ils ont tous lu Kimberley Williams Crenshaw ? Et qu’ils voient dans Judih Butler une philosophe libératrice ? Qui a déjà enseigné à l’Université sait de quoi il retourne en réalité en matière de lectures… Probablement ces enfants se sentent-ils plus à l’aise avec une morale qui leur semble juste, plutôt qu’avec des concepts et des théories qui peuvent sembler difficiles à comprendre. Quoi qu’il en soit, ils adoptent une posture de militantisme moral sans nécessairement comprendre les implications philosophiques et politiques de leurs actions.

Rappelons nous l’affaire de l’enseignant alsacien, qui avait évoqué les caricatures de Mahomet devant ses élèves, entraînant de menaces de mort de la part de certains parents d’élèves. Certains militants wokes ont alors instrumentalisé cette affaire pour mettre en avant leur discours moralisateur, accusant l’enseignant de racisme et de colonialisme.

Ce manque de fondement philosophique ne signifie pas que les idées du wokisme sont inoffensives. Au contraire, elles peuvent être extrêmement dangereuses lorsqu’elles sont utilisées pour justifier des politiques qui remettent en cause les valeurs fondamentales de la démocratie.

Le wokisme se présente en effet comme une morale qui prétend dire ce qui est bien ou mal en matière de moeurs. De ce point de vue, il représente une faillite de la sociologie qui devient prescriptive. Les partisans du wokisme cherchent à imposer leur vision du monde à travers une milice de la pensée, qui utilise des méthodes de pression, de censure et de discrédit pour faire taire toute forme de critique. Dans ce contexte, l’Université joue le rôle de caution scientifique de la pensée morale relayée par différents milieux, des médias main stream au GAFAM. Elle sert ainsi de support pour promouvoir une vision moralisatrice et la légitimer par un faisceau de connotations. Le mot « Université » lui-même n’est plus qu’un slogan propre à créditer des « experts » d’une légitimité superficielle.

Cette approche est extrêmement dangereuse, car elle peut conduire à la création d’une nouvelle aristocratie morale qui remettrait en cause le principe de l’égalité citoyenne. Il est essentiel de rappeler que dans une société démocratique, chaque citoyen doit avoir le même droit à la parole et que le vote d’un homme simple vaut autant que celui d’un sociologue à la prétendue pensée complexe. Le wokisme, en tant que morale, est régressif. Il renvoie les individus à leurs pratiques intimes (leur sexualité, leur comportement en société) et les place dans une position culpabilisante dont ils peinent à se démêler. Dans cet arbitrage permanent entre le bien et le mal, la minorité joue le rôle de victime inoffensive. Mais c’est une arme utilisée contre la majorité démocratique qu’on cherche à déstabiliser.

Quand ils ne cessent de brandir la question de la « panique morale » qui s’emparerait de leurs détracteurs, ils n’accusent personne: ils ne font qu’exprimer un souhait.

Xavier-Laurent Salvador

Xavier-Laurent Salvador

Linguiste, Président du LAIC