fbpx

Pourquoi il faut lire l’ouvrage de Carine Azzopardi

Quand la peur gouverne tout (Plon)

Dans ce livre incisif, Carine Azzopardi apporte toute une série d’informations, toujours référencées, sur les convergences entre islamisme « radical » et wokisme, une convergence qui n’a pas toujours été remarquée par les auteurs qui écrivent sur l’une ou l’autre de ces intrusions idéologiques dans la pensée contemporaine. Et pourtant, que d’interférences ! que de collusions entre la volonté des Frères musulmans, dont les objectifs d’islamiser autant que faire se peut les sociétés occidentales sont rappelés avec clarté, et la pensée molle et lénifiante de nos wokies dont le désir de ne blesser personne se fait agressif quand il s’agit de dénoncer et d’humilier ceux qui ne pensent pas comme eux… À cette connivence idéologique se greffe le désir fou d’un chef de parti, Jean-Luc Mélenchon, de devenir majoritaire en France en allant pêcher des voix dans les eaux troubles de l’islamisme et en reniant ses convictions passées.

Carine Azzopardi ne nous fait grâce d’aucun rappel, et c’est heureux : son métier de journaliste nous permet de retrouver la première dénonciation du wokisme américain, non dans les propos outranciers d’un DeSantis, mais dans une analyse fine de Barack Obama. Elle nous remet en mémoire les engagements de Mélenchon en faveur de la laïcité, de l’universalisme. Elle nous rappelle les propos écœurants d’Edwy Plenel, après les attentats de janvier 2015, qui dédouanait l’islamisme de la production des terroristes, dont il rendait responsables « les fractures de notre société » (mais qui donc la fracture, si ce n’est l’islamisme ? Nous jouons sur les mots…). Elle nous rappelle aussi l’incroyable titre du New York Times après la décapitation de Samuel Paty en plein jour, en pleine rue : toujours soucieuses de conspuer les « violences policières », ces bonnes âmes dénonçaient les policiers qui ont abattu l’assassin et non le crime abominable de ce dernier.

Un autre point fort du livre est la mise en évidence des contradictions récurrentes : l’abaya est un jour un vêtement musulman, un autre jour un banal vêtement traditionnel, selon ce qui arrange l’interlocuteur. L’oubli, peut-être involontaire (?), marque nombre de déclarations de ces « antiracistes » qui véhiculent (sans le savoir ?) une autre forme de racisme. Le travail minutieux de Carine Azzopardi en épluchant les médias, fait remonter à la surface tous ces oublis : oubli des victimes du FIS et du GIA lors de la décennie noire de l’Algérie, oubli des attentats du 11 septembre lors de l’analyse des attentats du 13 novembre, pour s’en tenir à ces deux exemples. Une remarque très importante : les universitaires américains ont été conduits à se désintéresser de l’analyse du phénomène djihadiste, et ce sont les journalistes qui ont pris le relais… L’université a abdiqué sa mission fondamentale de production de connaissances. 

La peur gouverne tout… Peur de se retrouver dans le camp des racistes quand on ose contester la notion même de « suprémacisme blanc », peur de perdre son emploi quand on n’est pas d’accord, peur d’être rangé dans la catégorie infâmante des fascistes, peur du chantage à « l’islamophobie », peur, bien plus prégnante, d’être la cible de ces fous de leur dieu. Du wokisme à l’islamisme, il n’y a qu’un pas. Chapitre après chapitre, Carine Azzopardi nous rappelle que nous vivons dans la peur. Ce livre vient juste à son heure, au moment d’un nouvel assassinat de sang-froid en plein jour, au moment où le terrorisme des islamistes radicaux de Gaza vient traumatiser atrocement les Israéliens comme la majorité silencieuse des Palestiniens. Oui, la peur gouverne tout, au Moyen-Orient comme en France. Et l’on retrouve toujours les mêmes au premier rang des soutiens du terrorisme, renvoyant dos à dos bourreaux et victimes…

Pourquoi lire le livre de Carine Azzopardi ? Parce que vous y trouverez quantité de choses que vous ne saviez pas – ou que vous avez oubliées ! De ce voyage au cœur de la haine, on ne ressort pas indemne…


Les bonnes feuilles

Sur la convergence entre les promoteurs de l’identité de genre et le communautarisme

Le raisonnement de la « papesse » de la théorie du genre, qui ouvre la porte à des identités de genre infinies, se transforme ensuite en critique du féminisme universaliste, qui ne serait que « blanc ». Judith Butler prend comme seul et unique responsable de l’oppression genrée le logos occidental. Et ce présupposé conceptuel l’emmène dans une impasse réelle. Dans son ouvrage Vie précaire, elle explique ainsi que c’est un préjugé occidental blanc que de considérer qu’une femme en Afghanistan qui porte la burqa doit l’enlever. Si elle la porte, c’est un signe de modestie. « Comme si, s’insurge Sabine Prokhoris, les femmes elles-mêmes là-bas n’avaient pas envie de sortir de cette oppression patriarcale et que si elles enlevaient leur burqa, elles étaient complices du préjugé occidental blanc. Au fond, si on pense qu’elles ont le droit, Judith Butler nous dit qu’on est pour George Bush.» Judith Butler reprend ainsi l’antienne foucal- dienne éculée «L’islam n’a pas le même régime de vérité que nous» pour pratiquer un relativisme intégral. On comprend mieux ainsi comment tant de néoféministes biberonnées à la théorie du genre envisagent la révolte iranienne qui se déroule depuis 2022, ou plutôt ne veulent pas l’envisager.

« Derrière le rideau de fumée de la théorie de Butler sur le “genre”, écrit Séverine Denieul, et en dépit des multiples précautions oratoires qui parsèment son discours, on ne peut s’empêcher de voir une posture idéologique de type communautariste. Cette théorie cache en réalité un communautarisme pur et dur.» De sa déduction de l’imposition du genre par le «logos occidental blanc», la philosophe américaine en déduit en effet l’existence de minorités de genre, et la nécessité d’une alliance des minorités en général, dont le point commun est d’être toutes opprimées par l’«impérialisme blanc ». La convergence se fera en particulier entre les « musulmans » et les LGBT. Sauf qu’à un certain stade la théorie du genre va se heurter au mur du réel et de la logique. 

Sur la convergence entre le mouvement US contre les violences policières et l’antisémitisme

Lors de l’émergence du mouvement Black Lives Matter en 2013, beaucoup de juifs américains ont naturellement participé aux manifestations, ayant une vieille tradition de proximité avec les luttes civiques des années 1960. Lorsque le site internet britannique du mouvement accuse Israël de « génocide », des associations juives au Royaume-Uni expriment cependant leur « consternation». En mars 2017, des flyers antisémites sont disséminés un peu partout sur le campus de l’Illinois à Chicago. Leur contenu : un appel à la fin du « privilège juif», car «en finir avec le privilège blanc, explique le flyer, c’est d’abord en finir avec le privilège juif». Un schéma pyramidal est illustré avec quelques chiffres, dont celui-ci : « 44 % des juifs américains sont dans le top 1 % des plus riches. » Des chiffres complotistes, sans aucun rapport avec la réalité. Des flyers du même acabit sont distribués à l’université du Colorado à Denver, à l’université du Kansas, à l’université de Northridge en Californie, ainsi qu’à Cap Canaveral en Floride, et même à la prestigieuse université de Princeton, comme le rapporte l’ADL (Anti-Defamation League), une ONG américaine de lutte contre le racisme et l’antisémitisme. Enfin, un autre document circule en ligne, à l’été 2020, postulant : « La fin du privilège blanc est à l’intersection [sic] avec la fin du privilège juif. »

Le dimanche 12 juillet 2020, une campagne se répand sur Twitter sous le hashtag #jewishprivilege. Lancé par des robots provenant de l’extrême droite américaine, il est relayé par des comptes qui se réclament du progressisme. Le lundi, dans l’après-midi, plus de cent vingt- deux mille messages le reprenant sont comptabilisés sur Twitter. L’écrivain Hen Mazzig remarque que les messages suprémacistes blancs « propagent des conspirations antisémites sur le fait que les juifs sont “privilégiés” – qu’[ils] contrôlent les médias, les banques et le monde ». Selon lui, « les utilisateurs progressistes se sont rapidement joints à la même conversation mais ont promu une idée différente – “que les juifs ne sont confrontés à aucune dis- crimination” et, en même temps, “sont responsables de la discrimination et d’autres maux auxquels de nombreuses minorités sont confrontées”. » Il pousse ensuite la commu-nauté juive à reprendre le hashtag et à le détourner. Beaucoup de personnalités juives vont ainsi twitter leur « privilège » avec un certain humour noir. « Il est ironique que la haine des juifs soit l’un des rares points communs entre la “gauche woke” et “l’alt-right” [l’ultra-droite]», écrit Aaron Weil, directeur de l’université Hillel en Floride.

En France, le même genre de campagne avait été lancé deux mois plus tôt sur Twitter sous le hashtag #sijetaisunjuif, avant d’être retiré par la plateforme pour « violation des règles de la société en matière de haine ». Et les derniers chiffres du ministère de l’Intérieur demeurent préoccupants : en 2022, quatre cent trente-six actes antisémites ont été comptabilisés. Une baisse relative car en 2021, cinq cent quatre-vingt-neuf avaient été recensés. 73 % des actes racistes portant atteinte à des personnes sont dirigés contre des juifs, alors qu’ils ne constituent que 1 % de la population totale. Les violences physiques ont augmenté de 36 % en un an. Comparativement, la communauté juive est de loin la première visée. 

L’affaire du vrai-faux podcast du New York Times

(…) L’affaire en reste là. Jusqu’au 27 janvier 2022… Ce jour-là, le New York Times et la boîte de production Serial mettent en ligne un podcast de plus de six heures sur le site web du journal ainsi que sur différentes plate-formes comme Spotify ou Apple. L’émission est menée tambour battant, comme une série d’investigation criminelle, pour dénoncer un « complot islamophobe » de la part de l’État britannique. Ce qui s’est passé, martèle l’émission, n’a rien à voir avec l’extrémisme : il s’agit seulement d’un problème de gouvernance. Une musique entraînante ponctue les interviews et les interventions des deux journalistes qui ont réalisé le travail. Une opération de brouillage rondement menée…

Les deux enquêteurs se sont focalisés sur un élément, qui est faux d’après eux : une lettre anonyme envoyée à la mairie de Birmingham qui a déclenché toute l’affaire. La missive décrit précisément les buts à atteindre, y compris l’installation d’équipes encadrantes « favorables au projet ». C’est un courrier qui aurait été envoyé par un membre de la communauté scolaire, qui l’aurait eu en sa possession. Mais les différents rapports n’en ont jamais dévoilé l’expéditeur ou l’origine. Pour le New York Times, c’est donc bien la preuve d’un complot islamophobe. En quelques jours, le podcast va être relayé par d’influents comptes sur les réseaux sociaux, comme celui du Conseil des musulmans de Grande- Bretagne, ou ceux des associations antiracistes proches des islamistes MEND ou CAGE. Les réseaux sociaux wokes vont ensuite prendre le relais. (…)

Le féminisme islamiste

Dans ces nombreux petits livres qui guident la vie quotidienne des «croyants», on trouvera des recommandations essentielles comme : « Les hommes ont autorité sur les femmes…», ou «La femme doit obéissance absolue à son mari sauf lorsque cela com- porte une désobéissance à Allah». Outre la légitimation du viol conjugal, on trouvera dans ce genre de littérature qui promeut le voile comme une vertu, «l’interdiction absolue de frapper le visage » (mais pas le reste) par le mari, les conseils pour une polygamie éclairée, l’accord des parents pour le djihad… Ce livre de recommandations pour les droits des croyantes (acheté au hasard, parmi d’autres), dit tout de même «qu’enterrer les filles vivantes est un grand péché », et que les parents auront du «mérite à élever une fille». «Frappez-les, conseille l’auteur, mais en restant conformes à la bienséance et sans violence, en cherchant à les éduquer car le but n’est pas de leur faire mal mais de les corriger de façon non affligeante. » Ce genre d’ouvrages n’est malheureusement pas une exception. Les études d’Anne-Laure Zwilling ont montré que ces livres issus de la littérature salafiste, saoudienne pour la plupart, sont quantitativement présents de manière très impressionnante dans les librairies islamiques.

Jacques Robert

Jacques Robert

Professeur émérite de cancérologie, université de Bordeaux